RDC, SADC, Kabila

Par CAS-INFO

La sortie très commentée du nouveau Président botswanais le 18 Avril dernier n’était qu’un coup de semonce. Un de plus. Intervenant à la 13e édition de la conférence Oppenheimer de l’Institut des études stratégiques, à Londres, Mokgweetsi Eric Keabetswe Masisi avait profité de cette tribune pour appeler son homologue congolais à « comprendre ce qui se passe » et à « quitter le pouvoir » à l’issue des élections de décembre 2018. Faisant ainsi la démonstration que la région de l’Afrique australe se mobilise vraiment sur le dossier RDC.

Car si le « petit » Botswana s’agace publiquement de la « tragédie en RDC » expliquée par le fait que « son président est resté au pouvoir plus longtemps qu’il ne le fallait », en coulisse, les grandes puissances régionales s’activent pour éviter que l’instabilité dans un pays fort de 80 millions d’habitants ne déborde leurs frontières. Ainsi que le démontre la tension lors du sommet extraordinaire de la Troïka de la SADC le 24 avril dernier à Luanda. Selon Paris Match qui révèle l’information, le Président sud-africain Cyril Ramaphosa et Joseph Kabila auraient eu un échange musclé sur le piétinement du processus électoral. Alors que le Président congolais [agacé par la pression de ses pairs] dénonçait un procès, le successeur de Jacob Zuma lui aurait rétorqué qu’il ne s’agissait aucunement d’un procès mais que « les élections n’étaient pas toujours organisées », lui aurait-il répondu avant de réclamer que celles-ci soient enfin organisées fin 2018 comme Joseph Kabila s’y est engagé, rapporte le magazine français. Voilà qui change de Jacob Zuma.

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À la tête de la SADC il y a encore quelques mois avant son éviction du pouvoir début 2018, l’ancien chef de l’État de l’Afrique sud n’avait pas hésité à cautionner le report des élections en 2017 sous prétextes des difficultés auxquelles faisait face la CENI. Se démarquant à l’époque de la pression de l’ONU, de l’Union européenne et des États-Unis. Depuis son départ du pouvoir, précédé deux mois plus tôt de celui de Robert Mugabe, au Zimbabwe, l’autre allié inconditionnel de Kinshasa, les choses ont changé.

Avec l’arrivée du nouveau régime en Angola, les mauvaises nouvelles se sont accumulées pour le Président congolais. S’il s’attèle à démanteler l’empire de Dos Santos sur le plan de la politique intérieure – ce qui aurait pu donner l’impression d’un camouflet pour l’opposant congolais Sindika Dokolo, gendre du puissant ancien Président – dans la région, João Lourenço est par contre en première ligne pour résoudre la crise congolaise et prévenir une nouvelle vague des réfugiés dans son pays. Une position partagée par la Zambie dont la plus grande communauté étrangère est constituée des Congolais.

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De la SADC, la pression sur Kinshasa commence aussi à venir de la région des Grands lacs. Discret jusque-là, le Rwanda fait désormais part de ses inquiétudes à propos de la crise politique chez son grand voisin. « Le Congo a neuf voisins et chacun de nous est affecté par ce qui se passe [dans ce pays]. C’est pourquoi, naturellement, les voisins ont la légitimité de faire ou de dire quelque chose à ce propos. Et si vous pouvez comprendre qu’en tant que voisins, comment aider la transition au Congo à se dérouler sans nous affecter ou sans les affecter de façon négative, alors nous aurons agi raisonnablement », a expliqué le Président rwandais Paul Kagamé le 29 avril 2018, à Kigali. En présence de l’opposant congolais Moïse Katumbi.

Il y a un an, fort du succès de l’offensive diplomatique lancée par le gouvernement congolais à travers une tournée régionale baptisée campagne d’« explication » et de « clarification », le conseiller diplomatique du chef de l’État, Barnabé Kikaya, brandissait un « mur de défense diplomatique contre les ingérences étrangères ». Un mur qui semble aujourd’hui s’effondrer jour après jour.