Le président kenyan William Ruto reçu à Kinshasa par son homologue Félix Tshisekedi le 21 novembre 2022 - Crédit photo présidence.cd

Par CAS-INFO

Les relations diplomatiques se sont brusquement tendues entre la République démocratique du Congo et le Kenya. En cause, le lancement le 15 décembre dernier, en sol kenyan, d’une nouvelle organisation politico-militaire qui défie le pouvoir de Kinshasa. Avec, à sa tête, l’ancien président de la Commission électorale congolaise, Corneille Nangaa, l’Alliance Fleuve Congo (AFC), regroupe plusieurs mouvements armés, notamment le M23. Elle entend « sauver la nation en danger » et accuse Félix Tshisekedi d’ « avoir fait le choix délibéré de sous-traiter la sécurité nationale en sacrifiant les Forces armées de la République démocratique du Congo ».

Ce ne sont pas tant les accusations de l’ancien chef de la CENI qui posent problème, puisque le chef de l’État a déjà lui-même affirmé faire recours à des « coaches », des mercenaires, dans sa lutte contre le M23. Ce sont les conditions de l’annonce de cette nouvelle rébellion et le lieu choisi, le Kenya, qui interrogent. En laissant Corneille Nangaa proférer ses menaces devant les caméras du monde entier, les autorités du Kenya font ni plus ni moins un doigt d’honneur à leurs homologues congolaises. Le président kenyan, William Ruto, a d’ailleurs tenu à porter lui-même ce message en affirmant à la télévision dimanche que le Kenya était une démocratie et que « nous n’arrêtons pas qui que ce soit pour avoir fait une déclaration« .

Dans la gueule du loup

Les propos du président kenyan sont non seulement humiliants à l’égard d’un pays ami. Ils sont surtout surprenants pour deux États membres d’une même organisation régionale, l’EAC, censés, selon les termes de la charte qui les régit, lutter ensemble contre les menaces communes. Par son refus d’« étouffer » le mouvement de Nangaa, comme le lui a demandé le ministre congolais de l’Intérieur, Peter Kazadi, le Kenya fait clairement au « petit nouveau » de l’EAC la démonstration de la fourberie qui caractérise cette organisation tant décriée par l’opposition congolaise alors que le président Félix Tshisekedi pensait bien faire en y adhérant en mars 2022. Le temps nous a malheureusement rattrapés. La RDC semble bien s’être jetée dans la gueule du loup.

Après avoir humilié les troupes de l’EAC dirigées par le Kenya et les avoir prié de se retirer de l’Est du pays où elles étaient déployées pour empêcher les affrontements entre l’armée congolaise et le M23, Kinshasa ne s’attendait tout de même pas à recevoir de Nairobi ou de n’importe quelle autre capitale régionale des fleurs. Le piège tant redouté, de l’EAC, éclate au grand jour. Il va désormais falloir trouver les moyens d’en sortir rapidement en misant sur tous les mécanismes possibles de résolution des conflits.