Le chef de l’État a, enfin, donné une interview dans la presse le samedi 3 Juin 2017. Une première depuis 5 ans. Et le moins qu’on puisse dire est que Joseph Kabila est resté égal à lui-même : dire beaucoup de choses tout en disant peu en même temps. Un classique chez le numéro Un Congolais.
La sortie du président dans les colonnes du Magazine allemand Der Spiegel était l’occasion de clarifier la situation. Alors que la crise prend des dimensions inquiétantes. Las, Joseph Kabila n’a pas dérogé au registre dans lequel les Congolais sont habitués avec lui depuis 16 ans : ne jamais clairement designer la direction à prendre, brouiller les pistes et maintenir le suspense jusqu’au bout.
On l’attendait sur les questions majeures de sortie de crise dont la principale concernant la tenue des élections à la fin de l’année comme le prévoit l’Accor de la Saint Sylvestre, le chef de l’État assure vouloir les organiser le plus vite possible, mais « des élections parfaites ». Tout en prenant soin de donner deux précisions au sujet de ces élections : 1) il n’a rien promis du tout, 2) Ce n’est pas lui, mais la Commission électorale, qui organise les élections.
La Ceni pose les préalables
Problème. L’accord du 31 décembre 2016, qui permet au chef de l’État de garder son poste, a été signé par ses éminents délégués au Centre interdiocésain, et normalement, au nom du chef de l’État. Car, comment expliquer le contraire. Par ailleurs, concernant la CENI, son président censé, avoir, à l’heure actuelle, publié le fameux calendrier électoral, ne cesse de renvoyer la balle aux politiciens à qui il réclame, avant toute chose, la loi de répartition des sièges et la mise en place du Conseil national du suivi de l’Accord (CNSA). Tandis que l’Assemblée nationale elle-même prend tout son temps.
Les pistes se trouvent davantage brouillées dans la communication présidentielle lorsqu’il s’agit de la volonté supposée du chef de l’État de modifier la constitution pour pouvoir briguer un 3e mandat. « J’ai déjà été claire à ce sujet », a juré le président de la République en défiant quiconque de lui apporter une preuve orale ou matérielle démontrant qu’il aurait parlé d’un projet de changement de la constitution. Pour autant, Joseph Kabila n’exclut pas cette possibilité. « Changer la constitution est constitutionnel », rappelle-t-il en revendiquant que dans la Constitution il existe le mot referendum. Si le président a tout de suite assuré n’avoir pas « encore » évoqué l’idée d’un referendum, ce n’est pas le cas de ses lieutenants, à l’instar d’André Atundu, porte-parole de la Majorité présidentielle, pour ne citer que lui, qui n’en finit pas de véhiculer cette possibilité depuis plusieurs semaines.
Une succession de suspens
Si, aucun cap n’a été fixé à l’occasion de cet entretien de Joseph Kabila, largement commenté au sein de la classe politique congolaise, cela confirme au moins une constance dans le discours du chef de l’État depuis le début de la crise, voire avant. De la « parole d’officier » lancée en 2015 dans Jeune Afrique, avec une promesse de ne pas toucher à la constitution, étant donné que le « pouvoir use [et qu’il] faut savoir partir », dans Der Spiegel, le chef de l’État n’exclut plus cette possibilité « qui est prévue dans la constitution ».
Entre les deux extrémités, le discours de Joseph Kabila sur la sortie de crise a évolué en dans de scie. Tantôt, le calendrier électoral neserait connu qu’une fois la révision du fichier électoral terminée (Discours en Ouganda le 4 Aout 2016), si ce n’est, permettre aux 10 millions de nouveaux électeurs de se faire enregistrer sur les listes électorales pour les élections cette année (2016) ou un autre jour (Discours en Tanzanie le 4 Octobre 2016).
Un autre jour. Assurément pas en décembre 2017. Que le chef de l’État n’a pas promis. Du tout.