Félix Tshisekedi, Reprend la main

Par CAS-INFO

« Rejetez la continuité et rejetez la confusion ! ». Dans une campagne présidentielle, ce sont les formules choc qui restent. Alors que le célèbre « Yes we can » accompagnait le premier Président noir à la tête des États-Unis en 2008, en France, l’anaphore, « Moi Président », de François Hollande, déstabilisait, en 2012, Nicolas Sarkozy. En renvoyant dos à dos le régime de Joseph Kabila qui « veut maintenir les Congolais dans la misère » et la coalition LAMUKA, dont la position sur la machine à voter « reste une confusion », Félix Tshisekedi a peut-être trouvé samedi à Lubumbashi sa formule magique de la dernière ligne droite de la campagne électorale.

Champion de l’Éat de droit… 

Pendant que le candidat du pouvoir, Emmanuel Shadary, rendu inaudible par les deux mastodontes de l’opposition, peine à se trouver un espace, le leader de l’UDPS, l’enfonce un peu plus dans le bilan de son mentor, marqué par la pauvreté, le chômage et l’insécurité, répète le chef de file de l’opposition au cours de ses derniers rassemblements tout en montrant la voie du changement. Car si, l’ensemble de l’opposition passe aux cribles les 20 ans de règne de Joseph Kabila, Félix Tshisekedi a décidé d’insister désormais sur la vulgarisation de son programme.

À Mbujimayi mais aussi à Kananga, sa proposition d’instaurer le service militaire obligatoire, d’un an, après l’école secondaire, fait mouche. Elle est critiquée notamment sur les doutes qu’elle suscite quant à sa faisabilité. Mais elle est aussi largement commentée sur les réseaux sociaux. Par ailleurs, grâce à cet accent, qu’il met sur son projet présidentiel, Félix Tshisekedi laisse filtrer l’image de la modernité, d’un Président de l’État de droit qu’il veut devenir. Président de la cause des femmes. Président qui prend la défense des policiers, forces de l’ordre les plus détestées des Congolais. « Mais qui ne sont eux aussi que victimes du système en place », explique le patron de l’UDPS qui promet de leur redonner leur dignité. Sans oublier sa politique économique basée sur le principe de « gagnant-ganagnt », que la quasi totalité des candidats propose, mais pour laquelle il se pose en seul capable d’incarner la garantie d’application.

Des proches de Katumbi font défection au profit de Tshisekedi 

Englué dans une difficile guerre contre la machine à voter, dont il semble avoir du mal à se défaire, Martin Fayulu, lui, qui a pourtant démarré sa campagne électorale en trombe dans l’est du pays, connait une période de moins bien. En partie en raison de la perturbation de ses meetings  par les forces de sécurité dans le Katanga et le Maniema. Lui, le candidat soutenu par l’ancien gouverneur du Katanga, ennemi juré de Joseph Kabila, est sans doute en train de payer les frais d’une alliance à risque (?). Mais il y a aussi cette stratégie mi-figue mi-raisin sur la machine à voter qui commence à devenir intenable à mesure que les élections approchent. À la fois auprès de centaines de milliers d’électeurs que le candidat est en train de convaincre et qui auront au bout du compte besoin d’une consigne de vote sans ambiguïté. Et (surtout) à l’endroit des membres de LAMUKA dont l’incertitude sur leur avenir ne pourrait durer indéfiniment.

Deux d’entre eux, figures symboliques du clan Katumbi, Claudel Lubaya et Delly Sesanga, n’ont d’ailleurs pas résisté longtemps à la pression de leurs électorats respectifs, de Kananga et Luiza, deux bastions de l’UDPS. Autrement dit, des circonscriptions placées désormais en alerte rouge. Après avoir tenté en vain de réconcilier les deux coalitions de l’opposition, les deux opposants ont fini par rejoindre officiellement Félix Tshisekedi séance tenante lors du grand meeting de Kananga le vendredi 14 décembre 2018. Mettant un peu plus le candidat de « CaCh »sur son petite nuage alors que s’amorce le sprint final de la campagne électorale.

Mais de là à en conclure déjà sur l’issue du vote du 23 décembre 2018, il y a toute une montagne. Simplement parce que les machines à voter et leur controverse sont toujours là et Martin Fayulu – qui a continué à faire sa démonstration de force dans le nord ouest du pays – pourrait toujours au final avoir raison. Tandis qu’à l’instar de nombre d’élections en Afrique, les divisions de l’opposition ont toujours profité au pouvoir en place. À moins que le candidat de l’UDPS prévoie de compter aussi sur sa foi chrétienne pour contrôler la situation. Il appelle en tout cas les Congolais à observer une journée de jeûne le 21 décembre 2018. Soit deux jours avant le vote. Objectif, prier pour…les bonnes élections.