Dans sa tribune parvenue à CAS-INFO , Honorine Matondo, professeur des universités, a réagi à la dernière sortie médiatique du vice premier ministre et ministre de l’intérieur, sécurité, décentralisation et affaires coutumières au sujet des élections des gouverneurs et vice-gouverneurs dans 14 provinces de la RDC.

Selon cette scientifique, professeur en droit constitutionnel, « la province du Kongo-Central central devrait être extirpée de la catégorie des provinces à problème vu que la cour de cassation et le tribunal de Paix de Matadi avaient déjà tranché sur le dossier Atou Matubuana contre l’ancien président de l’Assemblée provinciale Matusila« .

D’après elle, « vouloir organiser les élections du gouverneur au Kongo-Central c’est créé la crise là où il n’existe pas. Elle appelle le président de la République et le premier ministre a intervenir pour stopper le deviationnisme de Daniel Aselo« .

Voici l’intégralité de la tribune telle que parvenue à CAS-INFO

Par Honorine Matondo, professeur des universités

Une révolution qui mange ses propres enfants au lendemain de la victoire se tire à coup sûr une balle dans les pieds. Pas plus tard qu’il y a neuf mois, le pays tout entier avait du mal à prendre son envol, englué dans un bourbier où l’avait conduit l’attelage du couple FCC-CACH. Pendant que dans la capitale les hommes du Président étaient occupés à tétaniser l’ogre FCC, au Kongo Central Atou Matubwana avait déjà réussi à s’extirper des mailles de la famille politique de Joseph Kabila dont les fatwas ont fait choux blanc. Ce qui a fait penser à plusieurs analystes que le courage républicain du gouverneur du Kongo Central, qui avait alors préféré obéir à la vision du Chef de l’État qu’aux pressions de sa famille politique, a inspiré de toute évidence la plupart de ceux qui ont répondu à l’appel du président de la République pour la constitution de ‘Union Sacrée de la Nation, qu’ils aient appartenu avant au FCC ou à LAMUKA.

Kongo-Central, un exemple de stabilité institutionnel à ne pas hypothéquer

Force est de constater que depuis la naissance de l’Union Sacrée de la Nation, la province du Kongo Central est un modèle de stabilité dont l’exécutif et l’Assemblée délibérante filent le parfait amour. Cette sérénité retrouvée a permis au Gouverneur « Union Sacrée » de cette province de jeter les jalons de la matérialisation de la vision du Président de la République, notamment en ce qui concerne la transformation des conditions de vie de la population. Grâce à des projets d’envergure de transformation des infrastructures sportives, routières, portuaires, agricoles ou touristiques dans lesquels des investisseurs américains n’ont pas hésité à s’impliquer activement dernièrement, Atou Matubwana est un Gouverneur qui a la côte auprès de ses administrés, si l’on en croit les sondages les plus crédibles qui nous parviennent journellement de la province de Simon Kimbangu. Une embellie toute à l’honneur du Président de la République qui a d’ores et déjà fait savoir sa volonté de rempiler en 2023.

L’absurdité d’une nouvelle élection du Gouverneur

Un « tiens » vaut mieux que deux « tu l’auras« , dit-on. Quoi qu’on en pense, la succes story de l’Union Sacrée va à coup sûr connaître un arrêt brutal dans la province du Kongo Central si tant est que l’administration centrale s’obstine à organiser une nouvelle élection d’un Gouverneur et Vice-gouverneur. Dans tous les cas de figure, une telle éventualité reviendrait à donner de l’eau au moulin de l’opposition. Voici comment.

Primo, tout le monde sait que la réforme de la justice devenue indépendante est le premier bilan de l’état de droit que va brandir le Président Félix Tshisekedi en vue de sa réélection en 2023. Or, selon le service de communication du ministère de l’intérieur, une élection d’un nouveau gouverneur au Kongo Central se fustifierait par le fait que le Gouverneur actuel serait dans l’illégalité depuis une décision imaginaire de la Cour constitutionnelle prise en 2019. On parle là du représentant du Président de la République dans la province attenante à la capitale qui serait resté en fonction pendant plus de deux ans de façon illégale. Imaginez donc cette passe en or à une opposition qui n’attendait qu’une telle occurence pour taxer le garant du bon fonctionnement des institutions nationales et provinciales de n’avoir pas honoré son serment de veiller au respect de la Constitution et des lois de la République… Comme on peut le voir, en se méprenant sur l’organisation de l’élection d’un nouveau Gouverneur au Kongo Central, le Vice-premier Ministre, Ministre de l’intérieur accuse maladroitement le Chef de l’État de haute trahison pour avoir, selon ses services de communication, laissé un Gouverneur de province illégalement en poste pendant plus de deux ans.

Secundo, la province du Kongo Central s’est souvent résolument rangée du côté de l’opposition depuis l’éviction de Joseph Kasavubu du pouvoir. C’était par ailleurs un exploit inespéré que de voir un Gouverneur de province organiser une tournée triomphale pour le parti au pouvoir comme ce fut le cas de la tournée du Secrétaire Général de l’UDPS Augustin Kabuya à travers toutes les bourgades du Kongo Central. Il ne restait plus qu’à transformer l’essai aux élections générales à venir. Or avec l’incertitude que pourrait susciter le départ d’Atou Matubwana, rien ne prouve que d’autres forces politiques ne viendront pas ravir la province à l’Union Sacrée; surtout lorsque l’on se remémore la dernière visite affectueuse du président de l’Assemblée provinciale du Kongo Central à Moïse Katumbi le mois passé à Lubumbashi, ou encore les intérêts économiques et commerciaux de l’autorité morale du FCC dans cette province stratégique. Le Vice-premier Ministre Daniel ASELO serait donc entrain d’ouvrir inutilement la boîte de Pandore dont les effets néfastes contre sa famille politique sont a priori incalculables.

Paix de brave

L’erreur est humaine. C’est persévérer dans l’erreur qui peut s’avérer diabolique. Au regard de la démonstration apodictique que nous venons de faire sur la dangerosité d’une nouvelle élection du Gouverneur de province au Kongo Central, il serait de bon aloi que les uns et les autres se ravisent. Ce ne sont pas des raisons juridiques et politiques objectives qui manqueront aux pouvoirs publics pour se fendre d’un rétropédalage honorable. L’enjeu est de permettre à toutes les forces vives de l’Union Sacrée au Kongo Central de faire chorus autour du gouverneur Atou Matubwana, qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, en vue de se mettre utilement en ordre de bataille pour 2023. Une paix de braves s’impose.