Par Siméon Isako

Comment recréer le pacte social en République démocratique du Congo ? La question était au cœur du dernier numéro de « Masolo Ya Kati », un podcast animé par le journaliste Trésor Kibangulu en partenariat avec le Groupe d’étude sur le Congo (GEC). Pour le professeur Georges Kabongo, l’invité du jour, l’absence d’idéologie politique et de volonté populaire est à blâmer.

Écoutez le podcast ici.

Car, selon ce professeur de sociologie politique à l’Université de Lubumbashi, l’engagement du peuple avec la politique a déjà fait ses preuves dans l’histoire du pays.

« Il y avait une adhésion de la population, à la vision qui était incarnée par les pères de l’indépendance. Mais dans l’exercice du pouvoir, après avoir rencontré quelques abus, la population a commencé à se détacher des élites politiques et à leur donner une réputation assez sombre ».

Un désintéressement préjudiciable, déplore le chercheur, d’autant plus que c’est cette même population qui choisit ses représentants pendant les élections. Il ajoute :

« C’est pour cela que vous entendez au Congo des adages comme: la politique est très sale, laissez la politique aux politiciens, ce n’est pas notre affaire, ce sont des voleurs. Tout ceci est venu de la pratique des élites qui n’ont pas réussi à garder la confiance de la population. ».

L’autre institution coupable aux yeux de l’enseignant, ce sont les partis politiques. Sans vision ni programme, les formations politiques n’ont pas été le catalyseur qu’elles sont supposées être pour former des citoyens dignes de ce nom.

« Les partis politiques ont une lourde responsabilité, mais je pense que les partis politiques fonctionnent comme des entreprises familiales. C’est-à-dire avec aucune idéologie. Ils ont amené les gens à y adhérer, en dehors de toute logique idéologique, mais en fonction des relations d’affectation qui n’ont aucun critère idéologique. Cela renvoie à ce que nous pouvons appeler des agences de mobilisation de population. », assène le professeur.

Pour lui, la clé se trouve dans la formation des membres des partis politiques qui doivent prendre conscience de leurs devoirs et droits.

« Il faut former les membres des partis politiques de manière qu’ils sachent quels sont les devoirs de leurs leaders vis-à-vis d’eux. Ils ne doivent pas se comporter comme des inféodés aux leaders et doivent qu’il y a des choses face auxquelles ils peuvent dire non. Mais la population considère ses leaders comme des dieux, comme des charismatiques auxquels personne ne peut toucher, il y a des partis politiques où on n’accepte pas la moindre critique. Si vous critiquez le chef du parti, vous êtes éjecté ou violenté… Les autorités morales, donc des espèces des potentats à qui on ne peut rien reprocher. Cette culture se répercute sur les institutions parce que ce sont ces élites qui sont appelées à gérer ces institutions. Ils y amènent cette culture où ils sont incontestables, omniscients », détaille M. Kabongo.

La dernière saga, à l’Assemblée nationale, où, en l’espace d’un an, un premier vice-président est déchu « pour incompétence notoire » avant d’être rétabli à son poste, ne pouvait mieux faire échos à ce cri d’alarme.