L’Europe a soufflé ce samedi 25 Mars 2017 sur ses 60 bougies. Un anniversaire morose. Car 60 ans après, l’esprit de solidarité, de libre circulation et du respect des droits fondamentaux qui a conduit l’Italie, l’Allemagne, la France, les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg à signer le 25 Mars 1957 ce traité de Rome, précurseur de ce qui allait devenir l’Union européenne, s’est effrité au fil des années.
« Nous devons respecter nos règles communes de liberté et des droits fondamentaux qui fondent l’Europe », a d’ailleurs rappelé à l’ordre le président du conseil européen Donald Trust devant les Chefs d’États réunis samedi dans la capitale italienne.
En effet, si pour les européens eux-mêmes la montée de l’extrême droite à Paris, Berlin ou encore à Amsterdam, pour ne prendre que cet exemple, symbolise cette Europe qui se désintègre à petit feu, au Sud de la Méditerranée, le constat est encore plus sévère.
Pour de nombreux Africains, du Mali, de l’Éthiopie, de l’Érythrée, de la Somalie ou encore du Soudan qui ont tenté de fuir la guerre, la faim et la sécheresse, la route de l’Europe de ces 5 dernières années s’est transformée pour eux en un long cimetière. Plus de 10.000 morts en méditerranée depuis 2014 selon le dernier rapport de l’ONU l’an passé.
Si ce chiffre inclus également des migrants venus d’autres horizons comme la Syrie, l’Irak et l’Afghanistan, en Afrique, personne ne se fait plus d’illusion. L’Europe qui a durci le ton sur l’immigration ces dernières années ne veut plus d’eux.
Après l’immigration « choisie et non subie » de Nicolas Sarkozy, l’Europe de Marine Le Pen. Si c’est la présidente du Front national qui aura la « mal chance » d’inaugurer la 61eme année de l’union à l’Élysée, promet clairement qu’elle n’a plus rien à offrir à ceux qui arrivent, dans une sorte de « la France d’abord !», à la manière de Donald Trump.
On est bien loin de l’Europe de Konrad Adenauer, le Premier chancelier de la République Fédérale d’Allemagne dont le nom reste associé à une bourse de promotion des diplômés de l’Afrique de l’Ouest, de Jacques Delort qui, malgré les menaces de la mondialisation, a continué à prôner une Europe dans la diversité où l’Africain qui le souhaitait pouvait avoir sa place sans qu’on lui désigne à tout moment la porte de sortie.
En lieu et place de Mitterrand, celui que des milliers d’Africains ont célébré le 10 Mai 1981 dans les rues de Paris, de Robert Schuman, l’économiste français qui n’a pas cessé d’appeler les Européens à poursuivre la réalisation de l’une de leurs tâches essentielles, à savoir, « le développement du continent africain »…Au lieu de ces grands Européens donc, l’Europe est devenu le continent de Victor Orban, le dur Premier ministre Hongrois, de Geert Wilders, le sulfureux leader populiste aux Pays Bas, de Marine Le Pen et de Pegida en Allemagne, qui partagent un dénominateur commun : le rejet de l’étranger.
Une Europe des peurs, des discriminations, de l’égoïsme et des jungles de Calais, au sein de laquelle l’Africain se pose des questions en permanence sur son séjour, son statut toujours provisoire et vulnérable de sans-papiers, sa famille et bien sûr sa sécurité. C’est aussi ça que beaucoup gardent de la dernière décennie des 60 de l’Europe de l’union.