Par Jean Thierry Monsenepwo, Président de la ligue des jeunes de la CCU, Membre du Bureau politique de l’Union sacrée
Un sage a dit que « la diplomatie est un art qui requiert une si constante dignité, tant de majesté dans le maintien, tant de calme, qu’elle est fort peu compatible avec la précipitation. Elle nécessite l’effort assidu, et énormément de patience ».
Que dire de plus, si ce n’est que cet aphorisme colle à perfection à la méthode FATSHI qui, depuis son investiture, s’applique à briser l’isolement diplomatique dont a souffert notre pays. Là-dessus, il est impossible de ne pas mentionner un alignement des planètes à nul autre pareil. Jamais un Chef d’Etat n’avait autant été placé sur le piédestal des organisations régionales comme l’aura été le Chef de l’Etat congolais. Aussitôt après son entrée en fonction, le Président Tshisekedi devenait vice-président de l’Union Africaine, puis Président l’année d’après. A peine venait-il de passer le relai au Sénégalais Macky Sall que la fortune s’était arrangée à le hisser à la présidence de la Communauté Economique des Etats d’Afrique Centrale. Quelques semaines après, le même Président Tshisekedi a été porté à la tête de la Communauté Economique des Etats d’Afrique Australe pour le Développement (SADEC). Loin de nous l’idée de prétendre que le Président congolais a façonné à lui tout seul ce destin. L’ennui est qu’il y en ait parmi nos compatriotes qui trouvent dans cet état d’éveil diplomatique de notre pays, matière à persifler. Certains sont même allés jusqu’à soutenir qu’il n’y a aucun intérêt pour un pays comme le nôtre à siéger dans autant d’organisations régionales. D’autres encore se sont forgé a priori la conviction que la RDC n’a rien à gagner à accepter de présider autant d’organisations régionales en un temps record.
De prime abord, il sied de noter que la position géographique de la RDC au cœur de l’Afrique avec 9 frontières la fait appartenir d’office aux organisations sous-régionales du centre, du septentrional, du Sud et des grands lacs. Pourtant, malgré cette posture privilégiée, le pays accumulait plusieurs arriérés de cotisations dans toutes ces organisations ; ce qui en disait long sur l’autarcie dans laquelle d’aucuns l’avaient cyniquement emprisonné. Il s’ensuit que la RDC n’aurait jamais été portée à la tête de toutes ces organisations si elle ne s’était pas acquittée de toutes ses obligations. Le simple fait que les autres Etats membres aient accepté la présidence de la RDC est en soi une avancée spectaculaire pour un pays qui avait la réputation de ne compter que pour du beurre à l’international. D’autre part, la Constitution de notre pays et la pratique institutionnelle reconnaissent au Président de la République un rôle éminent en matière de diplomatie. On parle même de domaine réservé. L’on ne peut donc pas avoir raison de faire au Président Tshisekedi le grief d’exercer à bon escient cette prérogative constitutionnelle.
Au demeurant, la prise de fonction de la Présidence tournante de l’Union Africaine a permis à la RDC d’apporter énormément aussi bien au continent qu’à cette organisation. Sous Felix Tshisekedi, un prix littéraire africain a été construit autour des valeurs culturelles du continent, et la voix de l’Afrique s’est fait entendre en ce qui concerne la lutte contre la Covid-19, avec en prime l’adoption par l’OMS d’un plan de lancement des vaccins africains. La restitution des œuvres d’art pillées pendant la colonisation dont le principe a été adopté par les anciennes métropoles est à mettre également à l’actif du Président Tshisekedi dont la participation, en qualité de Président de l’Union Africaine, au dernier sommet du G20 à Rome, tout comme au récent sommet sur le climat à Glasgow a été salué par la presse internationale comme une master class. Tout ceci a valu à la mandature congolaise de FATSHI d’être reconnue par les Africains comme ayant permis de «construire des ponts et non des murs ». Aujourd’hui encore, l’on peut se permettre d’affirmer, sans crainte d’être contredit, que les forces politiques continentales continuent à travailler sous cette impulsion congolaise.
En conséquence, il était logique qu’après le succès confirmé de la présidence de l’Union Africaine, que l’action politique et diplomatique portée par Felix Tshisekedi puisse trouver son prolongement dans les organisations sous-régionales auxquelles la RDC est partie, qu’il s’agisse de l’EAC à laquelle le pays a eu la bonne inspiration d’adhérer, de la CEEAC, de la CEPGL ou encore de la SADEC. Ayant confirmé son leadership à l’échelle continentale et planétaire, c’est donc sans ressentiment que les Etats membres ont unanimement consenti à se plier au règne concomitant de la RDC à la fois à la SADEC et à la CEEAC. Cette double présidence inédite ne devrait avoir vocation que de rendre les Congolais, souvent malencontreusement tenus en piètre estime dans la sous-région, fiers de tenir enfin dignement le gouvernail. Au surplus, le fait est que l’intégration régionale élargit les marchés et les échanges, améliore la coopération, atténue les risques et promeut la coopération socioculturelle ainsi que la stabilité régionale. Plus particulièrement en Afrique, mieux qu’ailleurs, cette intégration favorise aussi l’élargissement des marchés régionaux, donne aux producteurs et aux consommateurs africains davantage de possibilités, bien au-delà des marchés parfois restreints de leurs propres pays.
Il revient aux Congolais de se rendre à l’évidence que la SADC et la CEEAC représentent un grand marché de plus de 300 millions de consommateurs : une véritable manne pour les producteurs locaux de notre pays. Il est établi que l’émergence d’un espace commun présente des avantages évidents pour les économies africaines. En effet, les communautés des nations induisent des marchés ouverts à l’intérieur et protégés vis-à-vis de l’extérieur, une zone d’échanges et d’investissements étendue pour des pays dont les poids démographiques ou économiques sont souvent limités, un gage de compétitivité accrue mais raisonnée, un pouvoir de négociation renforcé dans les instances internationales, des règles commerciales communes, des droits de douane identiques, des procédures administratives unifiées, un instrument de développement pour les principaux bailleurs de fonds, etc. Ces avantages ont d’autant plus d’intérêt dans le contexte de la mondialisation, où les économies nationales les plus solides sont malmenées par les flux et les décisions internationaux, que l’intégration africaine devient une urgence.
Le plus grand danger qui a jusqu’ici plombé le continent noir demeure l’invasion économique extérieure. Le souhait, dans ce contexte, est que les pays en voie de développement puissent réellement compter sur l’entraide et l’appui mutuel au sein de leurs organisations sous-régionales afin de leur permettre de mieux résister au rouleau compresseur de la mondialisation.
Puisant dans notre expérience d’homme d’affaire, nous sommes en mesure de certifier que la coopération régionale et sous-régionale constituent un véhicule idéal pour la libéralisation non discriminatoire du commerce multilatéral et l’intégration dans l’économie mondialisée. C’est dire toute la pertinence du thème choisi pour le sommet de la SADEC qui a vu le Président Félix Tshisekedi prendre les rênes de cette organisation, à savoir « Promouvoir l’industrialisation par le biais de l’agro-industrie, de l’enrichissement des minéraux et des chaînes de valeur régionales pour une croissance économique résiliente ».
Il s’agit, à n’en point douter, d’une vision qui rentre pleinement dans la mission de développement de l’Afrique qui incombe à la RDC, au regard de sa position géostratégique. La vérité est que notre continent ne va réellement se relever que le jour où notre pays prendra pleinement la mesure de ses responsabilités comme l’indique le leadership progressiste du Président Tshisekedi, d’autant plus qu’a toutes ces préoccupations, la RDC a des réponses concrètes. Pour l’industrialisation, notre pays a un potentiel énergétique extraordinaire que lui confère notamment le barrage de INGA 3 ; pour l’agro-industrie, notre pays compte 80 millions de terres arables à même de nourrir toute l’Afrique ; enfin pour l’enrichissement des minéraux par des chaines des valeurs régionales, la RDC compte des réserves énormes en minerais stratégiques. Voilà autant d’enjeux qui font de la diplomatie un domaine qui doit être ménagé par des querelles byzantines clivantes. Il n’y a pour cela aucune honte à admettre, même en étant dans l’opposition, que le Président Félix Tshisekedi nous fait honneur à nous tous.