Par Siméon Isako

A 4 mois de la tenue des élections présidentielle, législatives nationales et provinciales mais aussi municipales, le débat sur l’audit externe du fichier électoral continue de faire polémique.
D’une part, une frange de l’opposition, soutenue par les églises catholique et protestante mais aussi quelques organisations de la société civile appellent à un nouvel audit et d’autres part , la CENI, la majorité au pouvoir, et certaines ONG saluent ce qui a été fait et soutiennent la poursuite du processus jusqu’à la date
finale.
Dans cette logique, Denis Kadima affirme, sans crainte, que son institution ne compte pas soumettre, à nouveau, les listes électorales à quelque vérification.

L’exigence d’un nouvel audit du fichier électoral a été portée, d’abord, par Martin Fayulu. Puis par ses pairs du bloc de Lubumbashi, par le FCC de Kabila et enfin par certaines ONG.

Après les politiques, les églises, catholique et protestante qui, faut-il le rappeler, gardent une dent contre le Chef de la centrale électorale, dont elles n’ont jamais digéré l’élection, ont pris le relais de cette revendication avec notamment, les sorties médiatiques du cardinal Fridolin Ambongo, toujours aussi critique envers le travail de la CENI. Il a donc, tout naturellement, désapprouvé l’actuel fichier électoral, créant ainsi, au passage, la confusion dans l’esprit de quelques congolais qui croient en lui.

Évoluant ensemble depuis quelques années, l’ECC rejoint l’Eglise catholique dans ses prises de position et se radicalise, à son tour, contre le fait que les congolais devraient aller voter avec
l’actuel fichier électoral jugé « truqué« .

Selon les chiffres officiels, après audit, 43 millions de congolais sont retenus pour participer aux scrutins de décembre. Des statistiques contestées, comme on pouvait bien s’y attendre, par l’opposition avec en tête Martin Fayulu.

L’ex candidat malheureux à la présidentielle de 2018 affirme que la base des données contient, plutôt, 50 à 55 millions d’électeurs, d’où la nécessité d’un nouveau contrôle externe.

Fichier électoral, La CENCO implique ses câbles à l’international

Le forcing commence lors des rencontres privées avec les dirigeants de la CENI. Les responsables des églises catholique et protestante enjoignent littéralement l’administration électorale à accepter leur exigence de faire auditer, pour la seconde fois, le fichier électoral par leur partenaire, le centre carter. La même organisation américaine qui avait essuyé le refus exprès des autorités congolaises d’observer les élections générales de décembre 2018.

La pression est maintenue et se fait sentir davantage, lors de la rencontre, à Kinshasa entre la Sous-secrétaire d’Etat américaine par intérim, Victoria Nuland, Denis Kadima , les délégués de la Mission d’observation électorale de la Conférence épiscopale nationale du Congo et de l’Eglise du Christ au Congo (MOE CENCO-ECC).

Cette mission d’observation se propose, au cours des discussions, à conduire un nouvel audit dit « citoyen » via la méthode par échantillonnage nommée Sample Based Observation (SBO).
Surpris par des méthodes et requête proposées , Denis Kadima s’y oppose directement, il est soutenu, implicitement, par la Sous-secrétaire d’Etat américaine.
Loin de s’avouer vaincue, la CENCO, avec le soutien de Moïse Katumbi, fait jouer ses relations et obtient l’adhésion, à son combat, du Président du Comité pour la justice internationale et la paix de la Conférence des évêques catholiques des États-Unis.

Ce dernier s’engage à porter la lutte au niveau des USA. Il écrit au secrétaire d’État américain notamment pour signifier qu’un audit indépendant des listes électorales » n’avait pas été assuré. D’après plusieurs sources (dignitaires, opérateurs politiques et de la société civiles ), l’objectif majeur d’une partie des évêques de la RDC et de la présidence du Comité pour la justice internationale et la paix de la Conférence des évêques catholiques des États-Unis est de « pousser la CENI à revoir son calendrier, refixer les dates afin de permettre à l’opposition de se mettre en ordre de bataille, et ce, d’autant que certains de ses candidats ne sont pas prêts financièrement avec les cautions et surtout qu’une candidature unique pour la présidentielle est loin d’être trouvée« .
Au fait, « , a lâché un prêtre sous le sceau de l’anonymat.

Ce dernier laisse entendre que « ce qui complique les calculs de ces 2 églises, c’est qu’il n’y a pas deux de leurs fidèles capables de coincer l’actuel Chef de l’État au point de le battre. Elles craient que Moïse Katumbi soit déstabilisé le moment venu avec plusieurs faux dossiers d’où l’idée d’arracher un report pour mieux préparer des hommes solides à l’instar de Denis Mukwege« .

Fichier électoral, tout comprendre du bon travail de la Ceni

C’est un travail de qualité réalisé dans un très court délais dont les conclusions rassurent et ce, d’autant que les auditeurs ont adoubé le fichier électoral. Ceux-ci assurent que la CENI de Kadima a une très solide fondation pour le reste du processus électoral.

En effet, aux termes du contrôle effectué du 15 au 20 mai, un total de 3 344 183 enrôlés soit 7,07% ont été radiés du fichier électoral. Il s’agit de 2 235 798 doublons soit 4,73% ; 976506 mineurs soit 2,06%; 140239 enrôlés soit 0,2% sont extirpés à cause des photos tandis que 1559 soit 0,0% sont élagués pour données test.
Ce fichier contient des données valides, estimées à 43 955 181 électeurs. Il s’agit là des chiffres définitifs qui découlent des statistiques brutes de 47 299 364 enrôlés.
Ces statistiques sont le fruit d’un travail acharné de 5 experts, à savoir : Janet Love de l’Afrique du Sud, Muhabi Lufu Chisi du Malawi, Joseph Topangu de la RDC, Kabata Kabata Kabamba de RDC et Vianney Nzanzu Twite de la RDC.
Il a été notamment salué et approuvé par la Fondation internationale pour les systèmes électoraux, IFES,
une organisation américaine qui accompagne techniquement la CENI.

Vouloir refaire la même opération débouchera, sans nul doute, à la revisitation de la loi sur la répartition des sièges et à une transition. 3 semaines mois seront suffisant à croire Fayulu, alors que pour Matata, Katumbi, Mukwege et les Eglises catholique et protestante, la durée reste à déterminer

Depuis plusieurs années les congolais fatigués de la manière de faire non orthodoxe des prélats catholiques demandent à ces derniers de se lancer complètement dans la politique que de se cacher derrière le peuple et revendications infondées pour vouloir créer
un climat de méfiance et de trouble entre l’État et l’Église
catholique.

La détermination de Kadima

À travers la publication, le 11 août dernier, des listes des candidats recevables et irrecevables pour les législatives nationales, le président de la CENI, a prouvé, une fois de plus, sa ferme détermination à tenir son calendrier. Il ressort de cet exercice que le camp de Tshisekedi pointe en tête avec un nombre impressionnant des candidats reçus, du moins, provisoirement. Côté opposition, les partis de Moïse Katumbi, Delly Sesanga, Matata Ponyo Mapon ou encore Adolphe, remportent-ils aussi, la bataille du seuil de recevabilité. Ils pourront donc competir, sauf décision contraire de la cour constitutionnelle,à la députation nationale. Preuve, s’il en faut, que l’inclusivité tant réclamée par les partenaires nationaux et internationaux de la CENI, est
une réalité. Mais aussi, manifestation de la volonté des autorités de la CENI de produire des élections apaisées et transparentes souhaitées par tous.