Entre le chef de l’État Joseph Kabila et Moïse Katumbi, qui fait figure de son principal opposant, la rivalité se joue sur tous les terrains. Après l’épisode judiciaire qui a abouti à la condamnation à 3 ans de prison, et envoyé l’ancien gouverneur du Katanga en exil – auquel ce dernier a répondu en remuant ciel et terre pour obtenir les sanctions internationales contre le régime de Kinshasa – les deux rivaux ont démontré ces dernières semaines leur capacité à instrumentaliser les institutions internationales pour obtenir des gains politiques dans la crise politique interne : l’Union africaine pour Joseph Kabila, les Nations-Unies pour Moïse Katumbi.
Alors que la diplomatie congolaise a crié victoire à la suite de la déclaration de soutien des chefs d’États africains contre les sanctions occidentales imposées à des hauts responsables congolais, en marge du 29e sommet de l’UA à Addis Abeba, dans son édition du 12 juillet 2017, le site francais Le Point, relevait un texte minimaliste et non contraignant relevant plutôt d’une fiction que d’un réel soutien dans la mesure où Kinshasa avait besoin non pas d’une déclaration de soutien, mais d’une résolution demandant clairement la levée desdites sanctions. Bref, un service minimum, qui n’aura pas suffi pour empêcher l’Union européenne, le jour suivant, à maintenir ses sanctions et à menacer de les renforcer, au cas où il n’y avait pas d’avancées sur le processus électoral, au nez et à la barbe du chef de la diplomatie congolaise.
#RDC
Début des travaux en plénière du #29thAUSummit.
Le Président #JosephKabila parmi ses homologues africains. pic.twitter.com/UTLE7yHH5z— Présidence RDC 🇨🇩 (@Presidence_RDC) 3 juillet 2017
Pour Moïse Katumbi, le chemin de la croix passe par l’ONU. Depuis le 13 juin, le candidat du G7 à la présidentielle garde dans son tiroir une lettre du Comité des droits de l’homme des Nations unies recommandant aux autorités congolaises de faciliter son retour au pays en « homme libre » et sa participation aux prochaines élections. De quoi revigorer l’opposant qui n’a pas hésité d’annoncer son retour « imminent » au pays. Pour une énième fois.
Lorsque l’ex gouverneur du Katanga fait la promesse de rentrer au pays le 16 juin, à Paris, aux côtés de son célèbre avocat Éric Dupond-Moretti, il prend subtilement soin de préciser qu’il devait d’abord prendre le temps de « faire ses bagages » et de « dire au revoir aux amis ». En réalité, l’opposant congolais voulait s’assurer que toutes les conditions étaient réunies avant de prendre son avion, ainsi que l’a précisé récemment son porte-parole Olivier Kamitatu.
Merci @UNHumanRights de permettre mon retour en citoyen libre. Au-delà de mon cas, un signe de soutien aux Congolais privés de vraie justice pic.twitter.com/3iJX5WrhMI
— Moise Katumbi (@moise_katumbi) 17 juin 2017
Après, donc, avoir arraché, en un temps record et tambours battants, la décision du Comité de droits de l’Homme, Moïse Katumbi se heurte depuis à une double réalité institutionnelle. Premièrement, les décisions de l’ONU n’ont jamais été contraignantes devant les États souverains, comme l’illustre le cas de l’autre opposant Eugène Diomi Ndongala écroué depuis 2014 malgré la décision du même Comité de Genève désapprouvant en novembre 2016 sa condamnation pour « viol » sur mineure. Deuxièmement, la radicalisation des institutions à Kinshasa laisse apparaitre une forme d’autoritarisme dont l’une des caractéristiques est justement de ne pas se laisser dicter une autre loi que celle qu’un ministre de la Justice par exemple peut utiliser pour écarter un candidat de la course présidentielle.