Durant tout le weekend les Congolais en ont eu plein les yeux. Chemise rouge. Au milieu d’une marée humaine. Loin du brouhaha de Kinshasa. Vital Kamerhe est déjà en campagne. Sur le terrain. Dans son Kivu natal. Alors que toute l’attention est restée focalisée vendredi sur la nomination du nouveau Premier ministre, le président de l’Union pour la Nation Congolaise était lui déjà sur son vol pour Goma. Avant son triomphe à Bukavu qui confirme que sa popularité sur ses terres de l’Est ne se dément pas. Certains ont eu tort de l’enterrer un peu vite.
Mais il y a des interrogations que cette « campagne » avant l’heure de l’ancien président de l’assemblée nationale suscitent auprès de ses adversaires. Pourquoi, maintenant ? Et « pourquoi quand c’est lui, il ne se pose aucun problème », hurle un partisan du Rassemblement sur twitter. Ce dernier rappelle même que d’autres opposants n’ont pas eu le même privilège de s’émouvoir librement à l’intérieur du pays.
En terrain conquis et bien protégé
Dans ce contexte de forte intensité politique, les soupçons vont bon train sur les réelles motivations de l’opposant Kamerhe face au pouvoir qu’il est censé combattre. Est-il vraiment opposé à Joseph Kabila ?
Encadré par la police (du régime), accompagné par des dizaines des journalistes qui n’en finissent pas d’inonder les médias et les réseaux d’images de sa démonstration de force, certains n’hésitent pas à l’accuser de « rouler pour Joseph Kabila ». Lui qui permet de desserrer l’étau autour du régime concernant le débat du maintien au pouvoir en parlant, avec une voix d’« opposition », d’autre chose, du « cap sur les élections ». Et si la question était plutôt l’inverse ? Et si c’est Kabila qui roulait pour lui ?
« Le seul capable de lui garantir la sécurité »
En l’absence des preuves palpables qui puissent étayer une telle éventualité, certains faits, gestes et discours peuvent tout de même intriguer.
Côté discours, on vient de le voir, VK lui-même est en campagne pour mettre le « cap sur les élections ». Il se trouve que le processus électoral a été l’un des moments le plus importants du discours du chef de l’État le 5 avril devant le parlement réuni en congrès.
« Nous voulons dire solennellement à notre peuple que les élections auront bel et bien lieu », a lancé Joseph Kabila. Jamais il n’a été aussi loin dans sa détermination d’amener les Congolais aux urnes. Avec le financement propre » et loin des « ingérences extérieures ». Deux facteurs qui peuvent suffire pour organiser des élections à sa portée de main.
Mais Joseph Kabila que la constitution et l’accord de la Saint Sylvestre interdisent de se présenter pour un 3e mandat n’a pas dit qui sera le candidat pour lui succéder. Dans la Majorité présidentielle plusieurs noms sont revenus ces derniers mois, Aubin Minaku, Matata Ponyo ou encore Olive Lembe Kabila, avant de se ranger derrière le silence du chef. Mais « Vital Kamerhe est la seule personne qui peut garantir la sécurité du président si ce dernier acceptait de partir », confiait un cadre de la MP en Septembre 2016 lorsque le chef de fil de l’UNC faisait défection pour rallier le dialogue de la cité de l’UA boycotté par une grande partie de l’opposition.
Dans son édition No 5 paru vendredi, KIN’S, un des journaux du professeur Kin Kiey Mulumba publié à Kinshasa, se demandait si, de 2009, année de la rupture, à 2017 où il est reçu au Palais de la Nation, Kamerhe avait vraiment changé face à Joseph Kabila. La conclusion du tabloïd est sans appel. Il n’a jamais critiqué le chef de l’État en privée et est resté le même malgré les « humiliations » : humble. Jusqu’où iront-ils ?