Par Amiral Tatu
Leurs derniers verdicts n’ont pas été sans conséquences. A Kinshasa, les arrêts de la cour constitutionnelle invalidant près de la moitié des députés de l’opposition à l’assemblée nationale ont suffisamment pollué l’actualité politique en fin de semaine.
Certains ont accusé la haute cour d’avoir monnayé les sièges alors que d’autres y voient la main noire du Front Commun pour le Congo, unique regroupement à avoir tout raflé lors de ces contentieux. Face au tollé suscité par cette vague d’invalidations, le président de la haute instance judiciaire du pays a été convoqué lundi à la présidence de la République.
Reçu par Félix Tshisekedi, Benoit Lwamba s’est expliqué notamment sur le retard accumulé pendant l’examen de ces contentieux. En effet, les juges ont pris plus de temps que prévu par la loi qui leur accorde seulement soixante jours pour examiner les dossiers et rendre les décisions finales. Le président de l’institution justifie ce retard par le nombre élevé des requêtes en contestations reçues par la cour qui compte moins de dix juges.
« A la Cour, il n’y a que 7 juges qui peuvent siéger en cette matière. Vous comprenez vous-même que 1240 dossiers pour 7 juges en 2 mois, humainement ce n’est pas possible », a indiqué le président de la cour, après sa rencontre avec Félix Tshisekedi.
Ce dépassement de délai a suscité plusieurs réactions de la part de certains doctrinaires qui pensent que les hauts-magistrats ont intentionnellement violé les textes légaux. Intervenant dimanche dans le journal de 20h sur la RTNC, la télé publique, professeur André Mbata, constitutionnaliste proche du président Tshisekedi avait plaidé en faveur des sanctions contre les neuf juges de la cour qui ont violé, selon lui, l’article 72 de la constitution.
« Se donner plus de 110 jours pour rendre des arrêts qui devaient être impérativement rendus en 60 jours peut ne pas relever de l’incompétence ou de la paresse, mais un tel déni de justice devrait être considéré au minimum comme un intolérable manquement aux devoirs de leurs charges qui ne devrait pas rester politiquement impuni », avait déclaré André Mbata.
Difficile de savoir si les moyens de défense présentés par Benoit Lwamba ont convaincu Félix Tshisekedi. Acculée par la pression populaire, la haute cour a promis de réexaminer certains dossiers qui contiendraient d’erreurs matérielles. Les premières audiences de cette chambre spéciale pourraient se tenir ce mardi.
« Les personnes qui pensent que la Cour s’est trompée sont revenues avec des requêtes. On parle d’une commission, mais c’est toujours la Cour qui va voir si ces requêtes sont oui ou non fondées », a souligné M. Lwamba.
Selon l’article 168 de la constitution, les arrêts de la Cour constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours et sont immédiatement exécutoires. Mais « ses décisions peuvent être attaquées par la seule voie de rectification d’erreur matérielle », a nuancé le haut magistrat.