Le jeudi 25 Mai a été marqué, comme chaque année, par la célébration de la Noël des Kimbanguistes. Contrairement aux chrétiens du monde entier qui se rappellent de la naissance du Christ le 25 décembre, le Kimbguisme marche depuis près d’un siècle à contre-courant dans sa mission de réincarnation de Jésus-Christ en Afrique.
Au-delà des codes du christianisme hérités des missionnaires avant d’être remodelés dans un projet purement africain par le prophète Simon Kimbangu, c’est toute une révolution contre les pouvoirs publics coloniaux et postcoloniaux que ce dernier déclenchait lorsqu’au début du 20e siècle, en pleine colonisation, le Kimbanguisme commençait.
Administrateur au Congo Belge, Paul-Ernest Joset rappelle dans son livre intitulé « Quelques mouvements religieux au Bas-Congo et dans l’Ex-Afrique Équatoriale française » – publié en 1968, soit, 8 ans après l’indépendance – qu’envisageant, au départ, la venue d’un « Messie noir », qui allait délivrer le peuple africain des chaines européennes, ces mouvements messianiques ont basculé vers la lutte politique « émaillée parfois d’actes xénophobes et de subversion, voire même criminels pour certains », écrivait cet ex colon.
En réalité les Belges se sont rapidement trouvés débordés par cet homme (Kimbangu) qu’ils n’ont pas vu venir, et dont les prédications basées sur la liberté et l’émancipation de l’homme noir du joug colonial trouvent un fort retentissement parmi les masses colonisées.
« On raconte qu’il fait ressusciter les morts et plusieurs milliers des gens le suivent ». Ces confidences d’un responsable colonial en provenance de Nkamba à la hiérarchie, relayées par Paul-Ernst Joset, démontraient la mesure que le pouvoir colonial commençait à prendre de la menace Kimbangu.
Mais son arrestation, puis sa condamnation expresse à la peine de mort le 3 octobre 1921 pour incitation à la révolte n’ont rien changé au combat de Kimbagu désormais incarné par ses disciples.
Même si, pour André Geuns, auteur de la « chronologie des Mouvements Religieux indépendants au Bas-Zaïre, Particulièrement du Mouvement fondé par le prophète Simon Kimbangu 1921-1971 », la plupart de ces Mouvements n’ont pas attribué le label de leurs enseignements au Kimbanguisme, ils ont su, chacun, à son niveau, perturber la tranquillité coloniale.
C’est notamment le cas du Ngouzisme créé en 1930 sous l’influence de Samuel Matuba. Ce dernier, ainsi que plusieurs leaders qui l’accompagnent sont, comme ce fut le cas de Simon Kimbangu, soumis aux arrestations et relégations à plusieurs reprises. Ce qui n’a pas effrayé le prophète Mayanga, qui lance à Cabinda quelques mois après le Mouvement Nzambi Nkunguna.
La naissance en 1931 de Mpeve Nzambi porté par Massamba, l’émergence du prophète Madisasi (1935) à Kivala avec l’Armée du salut ou encore le Matswanisme, du nom d’un des fidèles de Simon Kimbangu, arrivaient à convaincre le pouvoir colonial de la nécessité de corser la répression. Les différents chefs spirituels sont relégués loin de leur base, généralement à Élisabethville, ou, en résidence surveillée comme le fut le prophète Massamba de Mpeve, de 1933 à 1948.
C’est dans ce contexte des mouvements messianiques qu’un auteur Congolais, Godefroid Muzalia Kihagu, a étudié le Mouvement politico religieux Bundu Dia Kongo. Gardant la même croyance messianique africaine, écrit-il, le Bundu Dia Kongo, porté par son chef spirituel Zacharie Badiengila alias Ne Mwanda Nsemi a fait évolué sa mission. Depuis avril 1990 (début de la démocratisation de la RDC), le groupe se fait le porte-voix de l’ethnie Kongo et réclame l’autonomie politique de la province du Bas-Congo devenu Kongo Central. Une lutte qui se fait au prix de la violence en milieux ruraux et de la répression de la part des pouvoirs publics.
En 2008, c’est d’ailleurs cet activisme mêlant messianisme et revendications politiques qui provoque une violente réactions des forces de sécurité. Bilan, des centaines de morts selon les Nations unies.
Les dernières nouvelles de Bundu Dia Kongo remontent au 17 Mai 2017, après l’évasion controversée de Ne Mwanda Nsemi de la prison de Makala. Avant son arrestation pour outrage au chef de l’État et incitation à la haine tribale, il avait menacé de mettre fin au régime de Joseph Kabila, entouré des « Makesa », ses disciples et combattants.