La crise politique en RDC est sans doute entrée dans sa phase la plus inquiétante. À six mois de la fin de l’échéance fixée par l’accord de la Saint Sylvestre, la perspective de tenir une élection présidentielle au plus tard le 31 décembre 2017 s’éloigne. Majorité comme opposition affutent leurs armes pour faire plier l’adversaire. Une opposition à la fois de style et d’idéologie, qui s’est, particulièrement et fortement exprimée entre les deux camps au plus haut niveau ce lundi 3 juillet 2017.
Dans une posture purement panafricano-nationaliste, Joseph Kabila, qui a passé ces dernières années à reléguer au second plan les sommets de l’Union africaine, s’y est, cette fois-ci, rendu, en personne. Et dès l’ouverture des travaux, lundi, le service de communication de la présidence de la république en a mis plein les yeux les Congolais. Tantôt Joseph Kabila discutant avec Alassane Ouattara, l’ivoirien qui a renversé Laurent Gbagbo, un président qui s’accrochait à son poste, en 2011. Tout un symbole. Paradoxal. Par-là, le chef de l’État souriant avec ses homologues africains. Quand il n’est pas montré entouré de sa garde rapprochée. Envoyant l’image d’un président bien en place. Droit dans ses bottes. Aux milieux de ses pairs.
#RDC
Début des travaux en plénière du #29thAUSummit.
Le Président #JosephKabila parmi ses homologues africains. pic.twitter.com/UTLE7yHH5z— Présidence RDC 🇨🇩 (@Presidence_RDC) 3 juillet 2017
L’enjeu pour Joseph Kabila – qui avait déjà préparé le terrain à travers une longue tournée diplomatique du ministre des affaires étrangères Léonard She Okitundu dans plusieurs capitales du continent – est clair : arracher le soutien de l’Union africaine face aux pressions occidentales. Et tenter, de ce fait, deux opérations : isoler l’opposition et espérer traverser de nouveau cet autre « décembre » qui arrive à grande vitesse sans heurts.
Article « 64 »
Le contraste est saisissant. L’un est à Addis Abeba, donc, siège de l’Union africaine, les autres, à Bruxelles, ancienne métropole coloniale. Une coïncidence que les stratèges de la Majorité, qui s’y sont déjà lancés depuis quelques temps, ne manqueront pas d’exploiter. N’empêche. C’est de Bruxelles qu’est venu le cliché que tout le monde attendait dans l’opposition. Pour en découdre avec le Pouvoir : main dans la main, le nouvel opposant et riche homme d’affaires Sindika Dokolo, l’ex gouverneur du Katanga et candidat déclaré à la présidentielle Moïse Katumbi et le fils de l’ancien leader historique de l’Udps Félix Tshisekedi, ont affiché leur unité. Avant d’annoncer via le compte twitter de Sindika Dokolo un possible recours à l’article 64 de la Constitution en cas d’absence d’élections cette année. « [C’est] le serment fait au peuple congolais : il n’y aura ni 3e dialogue, ni extension du mandat de Joseph Kabila après 2017 », peut-on lire sur le réseau social.
Union autour de l’art 64.1
Serment fait devant notre peuple: il n’y aura ni 3e dialogue, ni extension du mandat de Mr Kabila après 2017 #RDC pic.twitter.com/JVmyiGTwkV— Sindika Dokolo (@sindika_dokolo) 3 juillet 2017
Dans le même temps, le président de l’UDA, une autre formation de l’opposition, André Claudel Lubaya, appelait la Commission électorale à publier un calendrier électoral « clair », plus les « séquences » et les « moyens précis » d’ici le 31 juillet. Ce qui serait, selon lui, synonyme d’un geste d’apaisement. À défaut de cela, le député de Kananga tranche dans le dur, « la reddition du régime s’impose », a-t-il martelé.
Ce calendrier électoral « consensuel », c’est aussi la demande formulée pendant le weekend par le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en RDC Maman Sidikou. Un appel resté jusque-là lettre morte. En lieu et place, le président de la Ceni Corneille Nangaa a brandi lundi les plus de 31 Millions 500 mille d’électeurs déjà enregistrés sur les listes. Sans faire de commentaire sur le très attendu calendrier.
Dans ce contexte d’incertitudes, le retour de Joseph Kabila d’Addis Abeba sera scruté minutieusement. Ce que l’opposition va faire aussi.