Par CAS-INFO

« Après avoir constaté d’énormes revers subis par leurs protégés sur le terrain, les Forces de Défense du Rwanda ont, cette fois et à découvert, décidé de violer l’intangibilité de notre frontière et l’intégrité de notre territoire ». Comme elle en a pris la courageuse habitude au cours de derniers jours, l’armée congolaise n’y est pas allée par quatre chemins au moment de dénoncer l’occupation, lundi, de la cité de Bunagana par le Rwanda, alors que des vidéos et photos montrant des soldats rwandais en territoire congolais faisaient le tour des réseaux sociaux.

Pour les FARDC, cette occupation constitue ni plus ni moins « une invasion de la RDC ». « Et les Forces armées de la République démocratique du Congo tireront toutes les conséquences qui s’imposent et défendront la Patrie », a mis en garde le commandement militaire du Nord-Kivu.

La tonalité de la communication de l’armée congolaise ne laisse place à aucun doute sur le risque d’embrasement auquel se dirigent dangereusement les deux pays. D’autant plus que de son côté, le M23, bombe également les torses, en promettant d’« anéantir la menace quel que soit le lieu de sa provenance », en cas d’attaque contre ses positions.

Mûrir le conflit afin de forcer la négociation ?

L’arrogance du discours du M23 trahit le parrainage dont bénéficie la rébellion depuis des années de la part de Kigali. Cette posture étonnement, sûre, des rebelles, ne peut que susciter des interrogations sur leurs brusques capacités militaires, mais surtout sur les intentions de leur véritable patron, le Rwanda. En ressuscitant un mouvement défait en 2013 et qui n’existait plus que de nom depuis pratiquement une décennie, le Rwanda cherche-t-il à remettre en jeu son poulain ? S’agirait-il de remettre en selle et par tous les moyens un de ses atouts dans le conflit dans l’est de la RDC ? Écarté des consultations de Nairobi où les différents groupes armés discutent de leur avenir, le M23 ne disposait plus de ressources suffisantes pour influencer le cours des événements comme il le faisait par le passé.

Sommé de déposer les armes et de procéder à sa reddition, faute de quoi il s’exposait à la traque par l’armée congolaise, le M23 et ses soutiens extérieurs semblent avoir opté pour une formule qui a fonctionné dans le passé, à savoir, prendre le contrôle d’un territoire congolais, ensuite, s’inviter, en position de force, à la table de négociation. « Notre Mouvement réaffirme son engagement à poursuivre la recherche de la réponse à ses revendications par des voies pacifiques », a d’ailleurs rappelé l’organisation rebelle quelques heures après l’occupation de Bunagana tout en invitant le président Tshisekedi à « saisir cette opportunité pour mettre fin à la violence que provoque cette guerre inutile ».

Une rhétorique qui a tout l’air d’une rébellion qui se sent désormais pousser des ailes pour faire avancer son agenda. Comme il y a 10 ans après la prise de Goma.