Par Siméon Isako
Les participants du Congrès national des jeunes de l’Église du Christ au Congo (ECC), organisé du 5 au 12 mars 2022, au Centre d’accueil Mgr Shaumba, ont été enrichis de l’expertise du président de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), Denis Kadima Kazadi.
Le numéro un de la Centrale électorale les a exhortés à s’impliquer fondamentalement dans le processus électoral en cours en RDC en leur indiquant le rôle, à divers degrés, que les jeunes doivent jouer en tant qu’acteurs, cela en quittant la posture de spectateurs.
« Participation mais aussi représentation« , tels sont les mots-clés que Denis Kadima Kazadi a mis en avant afin de relever, avec les jeunes, qui constituent la majorité des électeurs, le défi d’une organisation qualitative des élections à venir.
« La jeunesse, à chaque période, joue un rôle bien spécifique. Il y a 60 ans, la jeunesse de cette époque-là a lutté pour l’indépendance. Si vous voyez les leaders dont on nous parle aujourd’hui nous avons l’impression que c’était de vieilles personnes. En réalité quand on dit Lumumba, Kasa-Vubu, Mobutu, c’était de jeunes gens qui se sont battus pour l’indépendance de leur pays. A chaque période de ma vie, chaque génération a son défi. Pour eux c’était l’indépendance politique. Il y a eu plusieurs batailles. Parmi certaines de ces batailles, par exemple à la période comme la
nôtre, il y a le défi de la paix à l’Est du pays. C’est anormal que nous ayons cette instabilité depuis plus de deux décennies. Je sais que les jeunes de ce pays se sacrifient pour cette paix-là. A une autre époque, il y a eu le défi de la démocratisation. Et c’est toujours les jeunes qui se sont pris en charge pour permettre au pays de se départir d’un système de parti unique au profit de celui que nous avons aujourd’hui. Nous sommes maintenant dans la phase de la consolidation de la démocratie. Et là aussi la jeunesse devra jouer un grand rôle ».
Au début, a-t-il rappelé, « on se battait pour qu’il y ait élection avec plusieurs partis politiques. Tout ce qu’on voulait, à cette époque, c’était d’être en mesure de prendre son bulletin de vote et de le mettre dans l’urne et voir que la personne que nous avons choisie puisse passer. Nous voulions qu’il y ait élections et il y en a eu en 2006. D’abord en 2005, il y avait référendum pour le premier cycle électoral 2006-2011 maintenant nous allons vers 2023. Donc le problème de tenir les élections ne se pose plus. La quantité ne pose vraiment plus un problème, c’est plutôt celui de la qualité. C’est le problème qui doit nous préoccuper ».
Pour le Président de la CENI, il est possible de coupler la quantité des élections à la qualité. « Quand il n’y a pas la qualité, il y a tout un tas de problèmes. On s’est disputé en 2006, en 2011 et en 2018. Si nous ne faisons pas attention en 2023, ça sera la même chose. La sensibilisation des électeurs est un moyen (que les gens sachent comment voter). En 2018, nous avons eu quelque chose de nouveau qui s’appelle la machine à voter. Beaucoup sont allés voter sans avoir jamais vu cet équipement auparavant et c’est sur place qu’ils apprenaient à l’utiliser. Et nous voulons que cette fois-ci, ça soit mieux. Les électeurs il faut les informer par rapport à leurs droits, la date et les lieux. Il n’y a pas meilleurs sensibilisateurs que les jeunes. Mais il faut les former ».
Avant de préciser : « Dans notre programme, nous avons réservé une place de choix aux jeunes. Je pense qu’une structure comme la vôtre pourra jouer un rôle de premier plan. Là, c’est par rapport à la sensibilisation, il y a également l’information, l’éducation civique. Parce que là aussi il faudrait que les gens sachent être de bons citoyens. Ce n’est pas tout que de savoir comment voter, où et pourquoi le faire ? Bien mieux, quel est le profil que nous recherchons ? L’idéologie ne joue vraiment pas grand rôle, car les gens sont malheureusement attachés aux affinités tribales et régionales avec des connexions ethniques. Il faut être conséquent avec nous-mêmes. C’est pourquoi je parle de la qualité des élections et la qualité de la démocratie. Le tout est d’allier la qualité à la quantité. C’est un rôle que nous devrons jouer ».
Aussi, il y a également l’observation électorale et là aussi la jeunesse devra y être impliquée, a déclaré le numéro un de la CENI. « Si vous êtes des jeunes des partis politiques, vous pouvez aussi faire la surveillance électorale. Il y a une différence entre l’observation qui est faite par les organisations de la société, des ONG, des confessions religieuses). A ce niveau, ce sont des citoyens qui jouent un rôle pour s’assurer de la régularité, de l’intégrité du processus électoral. La surveillance, en revanche, c’est au niveau d’un parti politique. Ce n’est pas mauvais de travailler avec les formations politiques. Malheureusement, elles n’ont pas toujours les ressources qu’il leur faut pour s’assurer que tout se passe bien« .
Denis Kadima Kazadi s’est voulu rassurant en montrant aux participants la pertinence de leur combat aux cotés de la Ceni.
« Il y a un domaine qui est un peu négligé tout aussi important : la prévention et la résolution des conflits électoraux. Il y a des gens qui jouent un très bon rôle dans leurs communautés pour aider à résoudre les problèmes qui se posent. Mais il y a des méthodes pour jouer un rôle dans la médiation et la résolution des conflits durant le processus électoral : de l’inscription des électeurs, à la campagne électorale et bien entendu au moment du scrutin. C’est un domaine où une jeunesse formée, encadrée et déployée peut intervenir et jouer un rôle », a-t-il souligné.
Il a mis en exergue le bien-fondé de la formation dispensée aux jeunes d’autres contrées où il a aiguisé ses compétences.
« Dans les pays où j’ai travaillé, on a dispensé des formations aux jeunes pour être utiles dans la résolution des conflits. Des jeunes filles et garçons qui ont développé des compétences en cette matière. Qu’arrivera-t-il après les élections ? On commencera à utiliser leurs services pour résoudre certains problèmes communautaires. C’est important que les jeunes puissent jouer ce genre de rôles avant que les gens puissent suivre la procédure judiciaire beaucoup plus complexe et coûteuse pas toujours accessible à tous. Alors vous devrez être les médiateurs. Appropriez-vous le processus électoral, ne soyez pas des spectateurs mais plutôt des acteurs. A l’état actuel, vous aurez l’avantage de participer de façon pertinente à l’actuel processus mais ne vous arrêtez pas à la participation exigez également un quota afin que vous soyez représentés dans les différents scrutins parce que la jeunesse fait partie de la majorité des électeurs. Ne vous laissez pas séduire par l’opportunisme. Ma visite marque mon engagement à travailler avec la jeunesse en général et à faire en sorte que ce processus électoral soit géré non seulement par la Ceni mais aussi par les jeunes que vous êtes et nous allons atteindre cet objectif ensemble« , a-t-il conclu.