Jusque-là réservé, Joseph Kabila est passé à l’offensive. À l’issue de sa rencontre, lundi, avec les évêques membres de la Cenco, le chef de l’Etat a fait passer un message clair, net et précis à l’opposition : il attend toujours une liste de 3 noms avant de faire son choix du futur Premier ministre devant conduire le gouvernement de Transition. Autrement dit, le Rassemblement qui s’est déjà rangé derrière le seul nom de Félix Tshisekedi, fils du leaders de l’UDPS décédé le 1er février dernier à Bruxelles doit revoir sa copie.
Sauf que dans les rangs de la coalition de l’opposition l’analyse reste toujours différente et elle se radicalise même pour certains, à l’image de Jean Bertrand Ewanga. Pour le président du Front Citoyen pour la République, il n’est pas question de proposer 3 noms. « Ce n’est pas ce que dit l’accord », a-t-il répété à CAS-INFO. Plus incisif encore, François Mwamba, ex coordonnateur du Mécanisme de suivi de l’Accord d’Addis Abeba passé dans l’opposition, a lui, renvoyé le chef de l’Etat dans les cordes de l’accord de la Cenco. « Ce n’est pas lui qui choisit. On lui propose un nom et il nomme », a assené le président de l’ADR qui participait lundi soir à l’émission télévisée Noticias, à Kinshasa.
Les calculs de Kabila, la carte de l’opposition
En confirmant, en personne, la ligne du « pourrissement » portée depuis des semaines par ses déléguées aux discussions directes, Joseph Kabila a tenu à montrer à la face du monde et aux Congolais : 1) que c’est lui le Patron. Sinon, comment pouvait-il en être autrement, au moment où les stratagèmes se sont multipliées dans son camps pour freiner la machine, entre « Signature sous réserve » de l’accord, l’interminable discussion autour de l’« arrangement particulier » et aujourd’hui, l’exigence d’une liste des candidats Premier ministrables, sans que le commandant Kabila ne siffle la fin de la recréation. 2) Deuxièmement, qu’après la mort de l’opposant historique Étienne Tshisekedi, plus rien ne l’obligeait à accélérer le tempo. Ses lieutenants les plus durs, à l’image de l’ancien ministre Kin Key Mulumba l’ont d’ailleurs répété haut et fort, « Tshisekedi décédé, l’accord de la Saint Sylvestre ne vaut plus rien »
En définitive, pour Joseph Kabila, la disparition de l’opposant qui était redoutable à ses yeux ouvre le jeu et les oppositions au sein de l’opposition. « Ils ont un sérieux problème », s’est même amusé le ministre des affaires étrangères Leonard She Okitundu sur RFI. Ce dernier n’a pas hésité à pronostiquer l’arrivée prochaine d’autres candidats à l’assaut du très convoité poste de Premier ministre.
Pour le Rassemblement, les temps sont durs et il faut avoir le cuir solide. En s’accrochant au fils de Tshisekedi, les Alliés de « Ya Tshitshi » veulent non seulement jouer la carte du nom le plus populaire sur la scène politique actuellement. Ils veulent surtout éviter de pas apparaitre comme ceux qui cèdent à toutes les exigences présidentielles. Depuis son exil, l’opposant Moïse Katumbi qui se verrait bien porter l’héritage laissé par Etienne Tshisekedi l’a bien résumé, « Plus personne n’a la légitimité, il faut appliquer cet accord qui va donner à tout le monde la légitimité ».
Pas sûr qu’un tel message passe du côté du Palais de la nation.