Par Yvon Muya
Le partenariat entre Félix Tshisekedi et Joseph Kabila traverse une sérieuse zone de turbulences. Et la défiance mutuelle entre leurs formations respectives, CACH et le FCC, est loin de s’arrêter. Dernier exemple en date, la déclaration musclée publiée dimanche par l’Udps. Dans cette lourde charge lâchée contre son puissant allié, le parti du Président de la république n’a pas mâché ses mots pour dénoncer « une œuvre diabolique conçue par la machine politique de l’ancien régime ». Une réponse sans détour aux dernières attaques du FCC contre les récentes ordonnances présidentielles portant nomination dans deux entreprises publiques.
En suggérant que la motion soulevée à l’Assemblée nationale contre les actes posés par le Chef de l’État visait à anéantir l’élan du changement intervenu au pays et porté par l’Udps (Sic), le parti de Limete a au moins mis les choses au clair. Qu’il ne fallait pas se faire trop d’illusions sur l’alliance CACH-FCC, qui n’en finit pas d’exposer publiquement non seulement ses divergences mais aussi les ingrédients de sa future explosion. Il faut dire que le « deal » dont les contours restent toujours gardés top secrets, qui a pourtant permis aux deux « partenaires » de rester (et d’accéder) au pouvoir, se révèle jour après jour être une véritable bombe à destruction mutuelle. Rien d’étonnant lorsqu’on sait que dans cette partie d’échec, à laquelle, se livrent Félix Tshisekedi et Joseph Kabila depuis le 24 janvier 2019, chacun de deux joueurs s’est arrangé à garder les moyens de neutraliser l’autre.
« Le peuple qui soutient le Président est plus majoritaire qu’eux »
Perdant d’un pouvoir qu’il contrôlait depuis 18 ans, Joseph Kabila qui a tenté en vain de se maintenir en poste, a trouvé une parade. En remportant non seulement la quasi-totalité du reste d’élections hors la présentielle mais aussi en obtenant de son successeur de ne rien changer dans le dispositif sécuritaire qui lui est resté loyal. Comme l’a récemment prouvé la reconduction du Chef d’État-major des FARDC, le dernier nommé du patron du FCC. Avec ses services de sécurité « fidèles », son Parlement au sein duquel il est ultra dominateur, et bientôt un gouvernement sur lequel il tient à garder sa mainmise, l’ancien président a de quoi faire chanter son successeur. Le débat sur les ordonnances en est la vivante illustration. Les prémices d’une relation qui s’annonce tumultueuse.
Mais attention, dans un régime semi-présidentiel qu’est celui de la RDC, Félix Tshisekedi conserve encore quelques marges de manœuvres et les exploitera à fond face à la machine FCC. Le Chef de l’État vient d’ailleurs d’en faire la démonstration en utilisant le levier des ordonnances présidentielles pour propulser à la tête d’une entreprise publique Gabriel Kyungu, un farouche opposant à Joseph Kabila. Au nez et à la barbe des Kabilistes. Et ce n’est pas tout. Coincé sur le plan institutionnel, le président issu de l’Udps pourrait par ailleurs se tourner vers un autre allié de taille. Ainsi que l’a clairement fait savoir Peter Kazadi, conseiller politique du Président. « Par excès de zèle et sans raison valable, certains députés se sont adonnés à la critique des actes du Président. Il s’agit là d’une violation grave de la constitution. Ces députés/FCC doivent savoir que le Peuple qui soutient le Chef de l’Etat est plus majoritaire qu’eux ! ». Ambiance.