Kabila, Katumbi

Par CAS-INFO

Cela faisant longtemps depuis l’ONUC et les Lumumba qu’une crise politique congolaise s’était autant déplacée jusqu’au siège des Nations unis. Pour les Congolais dont les jours à venir restent incertains, la 72e Assemblée générale de l’ONU restera dans l’histoire. Et pour cause, la guerre sans merci que se sont livrés le Rassemblement et la Majorité présidentielle. Avec, à la tête de chaque camp, un capitaine : Moïse Katumbi pour la coalition de l’opposition et Joseph Kabila pour le Pouvoir.

Le moins qu’on puisse dire est que les deux parties ont quitté New York comme elles s’y étaient rendues. Sans que les lignes aient véritablement bougé. Après avoir usé chacun des moyens d’attaque et de défense à sa disposition.

Mobilisé la veille de cette grande réunion annuelle de l’ONU, un des derniers grands rendez-vous internationaux majeurs de l’année, qu’il ne fallait pas surtout louper, avant la bataille annoncée du « 31 décembre », le duo Moïse Katumbi-Félix Tshisekedi, accompagné d’activistes des Mouvements « citoyens », a prolongé sa stratégie déployée depuis deux mois qui vise à obtenir –  face, à l’évidence d’un report des élections – la mise hors-jeu de Joseph Kabila dans la perspective d’une éventuelle transition. Résumons la trajectoire de l’opposition ces deux derniers mois : Le 22 juillet, à Limete, le Rassemblement clôture son 2e conclave. Il en ressort – en cas d’absence d’élections avant le 31 décembre – l’idée d’une « courte transition sans Joseph Kabila, mais avec une personnalité consensuelle choisie par la classe politique ». Le 18 Août à Paris, les signataires du Manifeste du « Citoyen congolais » leur emboitaient les pas en sonnant la mobilisation pour « une transition sans Kabila ».

Or, la communauté internationale – auteure de la résolution 2348, qui ordonne le respect de l’accord du 31 décembre 2016 (ONU), de sanctions « pour entrave du processus démocratique et abus des droits de l’homme » (UE et USA) ou encore d’une expertise plaidant la possibilité de tenir les élections dans le délai au stade où en est la CENI actuellement (OIF) – n’a pas voulu prendre le risque de jouer le jeu de la transition susceptible de mettre de l’eau au moulin du pouvoir de Kinshasa.

Problème, et c’est ici qu’il faut apprécier à leur juste valeur les moyens d’attaque et de défense du camp Kabila à New York. En réitérant leur appel au respect « total » de l’accord de la Saint Sylvestre, les puissants de ce monde n’ont rien fait de nouveau que Joseph Kabila n’a encore ignoré. Qui ne se souvient pas du fameux « je n’ai rien promis » prononcé par le chef de l’État début juin. Soit deux mois seulement après le vote de la 2348 ? Trois mois plus tard, à New York donc, le ministre des affaires étrangères était en face des partenaires de la RDC pour soutenir que « les élections [auraient] lieu nécessairement dans les prochains mois ». Le temps pour Joseph Kabila de monter au créneau, en guise de défense, et de dérouler sa rhétorique classique : « pas d’ingérence ni de diktat ».

Résultat, la balle reste au centre et l’incertitude persiste. « Les déclarations c’est bien, mais si rien n’est fait pour faire plier véritablement Joseph Kabila, il n’est pas exclu qu’on se retrouve dans le schéma burundais », s’inquiète un observateur de la vie politique congolaise. Notre interlocuteur en veut pour preuve la décision du comité des Droits de l’homme sur le retour au pays de l’opposant Moïse Katumbi resté à ce jour lettre morte. En tout cas, à l’ONU, l’ex gouverneur du Katanga a joué son va-tout. A-t-il réussi cette fois-ci à inverser la tendance ?