Par GEC

La Cour de cassation a cassé le lundi 11 avril la décision de la cour d’appel de Kinshasa/Gombe condamnant Vital Kamerhe à 13 ans de travaux forcés. L’arrestation de Kamerhe, il y a exactement deux ans, avait provoqué une onde de choc sur la scène politique congolaise. Alors, comment interpréter cette décision ? C’est le sujet du septième épisode de la saison 2 de Po na GEC, la capsule audio du Groupe d’étude sur le Congo(GEC) et d’Ebuteli, son partenaire de recherche en RDC qui tente d’éclairer l’actualité du pays. Elle est présentée cette semaine par Jason Stearns, directeur du GEC.

Contre toute attente, l’affaire Vital Kamerhe refait surface. Pour rappel : Kamerhe avait été condamné avec Jammal Samih, un homme d’affaires, suite à un détournement présumé de près de 50 millions de dollars américains dans le cadre du programme de 100 jours, le premier programme phare du président Tshisekedi. Les deux accusés ont écopé d’une peine de 20 ans de prison, prononcée par le tribunal de grande instance de la Gombe.Cette peine a été ensuite ramenée à 13 ans par la cour d’appel de Gombe. C’est cette dernière décision qui est aujourd’hui annulée.

Vital Kamerhe n’est donc pas totalement libre, bien qu’il ait été autorisé à quitter le pays pour se faire soigner en Europe depuis décembre 2021. La décision de la Cour de cassation laisse subsister la peine initiale, encore plus sévère, de 20 ans de prison. En effet, la Cour a déclaré que la cour d’appel avait commis une erreur de procédure; elle ne s’était pas prononcée sur le fond des accusations portées contre Kamerhe. L’affaire retourne maintenant devant la cour d’appel, avec des juges différents, dans les semaines à venir. Les experts politiques ont rapidement établi un lien entre cette décision et les élections imminentes de l’année prochaine, ainsi que les problèmes au sein de la coalition au pouvoir. Le parti politique de Kamerhe, l’Union pour la nation congolaise (UNC), est un allié clé de la coalition au pouvoir de Tshisekedi. Alors que l’UNC est restée dans la coalition malgré l’arrestation de son leader, certains experts suggèrent que Kamerhe doit être physiquement présent pour faire campagne pour la réélection de Tshisekedi l’année prochaine. D’autres sources confirment qu’il pourrait effectivement y avoir un remaniement ministériel prochainement, ce qui pourrait permettre à Kamerhe d’accroître le nombre des membres de son parti au gouvernement et même d’entrer lui-même au gouvernement. Le président Tshisekedi, cependant, aurait du mal à concilier la libération de Kamerhe – peut-être même sa réintégration au gouvernement – avec sa lutte contre la corruption, une priorité de son administration.

Le procès de 100 jours a été présenté comme l’une des principales réalisations de son administration dans ce domaine, un signe que personne n’était au-dessus de la loi. Deux ans plus tard, de nombreuses personnes arrêtées par le gouvernement de Tshisekedi pour corruption ont été libérées : Modeste Makabuza et Benjamin Wenga, un homme d’affaires congolais et l’ancien directeur de l’Office des voiries et drainage, ont bénéficié d’une grâce présidentielle en janvier 2021 ; l’ancien ministre de l’Éducation Willy Bakonga, condamné pour blanchiment d’argent, a bénéficié de la même mesure en novembre 2021 et a retrouvé son mandat de député à l’Assemblée nationale ; l’ancien ministre de la Santé Eteni Longondo a été arrêté en août 2021 pour mauvaise gestion présumée de la riposte Covid-19 mais a bénéficié d’une liberté provisoire quelques semaines plus tard ; Abdallah Bilenge, l’ancien directeur de la Régie des voies aériennes (RVA) a été condamné pour avoir détourné 15 millions de dollars américains l’année dernière mais a pu être libéré le mois dernier lorsque sa peine a été annulée.

Dans ce contexte, il ne sera pas surprenant de voir Kamerhe acquitté. Mais cela pourrait être à la fois un handicap politique et un atout pour Tshisekedi. Quelle décision prendra-t-il ? Ou bien la politisation du système judiciaire a-t-elle été exagérée et cette décision est-elle vraiment et seulement entre les mains de la cour d’appel .

En attendant, l’ouverture du procès, pour recevoir Po na GEC chaque vendredi sur votre téléphone, rejoignez notre fil WhatsApp en envoyant « GEC », G, E, C, ou « Ebuteli » au +243 894 110 542.

À bientôt !