Par A.L Kitenge, Stratège et Analyste économique

Vraisemblablement, par un recours à des rumeurs glanées sur la toile, à des approximations découlant d’une imagination aussi féconde que débordante et surtout à des informations volontairement tronquées issues, certains journalistes livrent à leurs lecteurs un récit biaisé cousu de fil blanc où s’entremêlent quelques chiffres sortis de leur contexte ainsi que de demi vérités, voire de contrevérités. Ces contrevérités sont proférées soit dans le dessein de mener un combat d’arrière- garde en faveur des lobbies dont les intérêts mafieux sont mis en péril par les actions engagées par le Gouvernement de la République au travers du Ministère de l’Economie Nationale, soit, dans le but d’exister dans la production médiatique en dissertant, sans recourir à la source autorisée ni vérifier les informations, sur un sujet qui intéresse incontestablement un large public. On offre le sensationnel tout en jouant avec la réputation des autres.

Dans la première hypothèse il est clair que l’on aura beau apporter aux concernés les éclaircissements qui leur manquent cruellement, ils n’en auront cure ayant, dans ce cas, mis leur plume au service des commanditaires. Dans la seconde hypothèse et pour peu qu’ils soient réceptifs et sincères, les développements qui suivent suffiront, on peut l’espérer, à combler leur déficit d’informations et pourraient les amener à revoir leurs copies pour une plus efficiente édification des lecteurs. Ceci sera un exercice d’honnêteté intellectuelle.

Cette tribune s’inscrit dans un élan d’engagement citoyen qui nous interdit de rester indifférent face à une campagne médiatique volontairement orchestrée contre le Congo pour flouer l’opinion sur le véritable combat qui se mène actuellement contre une mafia solidement établie dans le secteur de l’importation des produits surgelés. C’est la même force négative qui dépouille l’économie de ses réserves de change en imposant d’importer tout de l’extérieur. La mafia prive au trésor public des dizaines de millions de dollars tous les ans en manipulant les déclarations douanières et confisque tous les jours à chaque pauvre congolais une partie de son pouvoir d’achat en imposant des marges exagérées. Elle a visiblement entrepris de sous-traiter la gestion de ses frustrations par une certaine presse qui, volontairement ou sans le comprendre vraiment, prête ainsi main forte à des intérêts particuliers qui appauvrissement ouvertement les congolais et mettent même en péril la sûreté de notre État. Trahir ainsi son Pays pour une banale quête de buzz choque les esprits citoyens et nous pousse à livrer ici notre analyse afin d’apporter des éléments d’information susceptibles de mieux éclairer l’opinion nationale.

II. RAPPEL DU CONTEXTE

Sans revenir sur l’état de l’économie du pays au moment de la transition politique, il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de l’action gouvernementale, chaque ministère a des attributions spécifiques et transversales qui lui sont dévolues par les textes officiels. Pour sa part, le ministère de l’Economie Nationale a, notamment, la charge de réguler le marché intérieur en vue d’y assurer un accès aux biens et services au juste prix en tenant compte tant de la protection des consommateurs que de celle des principes d’une saine concurrence entre les opérateurs économiques.

La loi indique clairement que les prix sont librement fixés par ceux qui font l’offre des biens et services. Le choix de la RDC est celui d’une économie de marché. Seulement, cette fixation des prix est soumise au strict respect de la règlementation sur la limite des marges bénéficiaires.
Et toujours selon la loi, c’est au ministère de l’Économie Nationale qu’il revient de fixer cette limite et d’assurer un contrôle à postériori pour vérifier l’application de la règlementation. Ce contrôle a pour but de s’assurer que les opérateurs économiques, notamment les importateurs des produits surgelés, n’imposent pas à la population de payer un prix au-delà des marges autorisées. Tout prix qui génère une marge supérieure à la limite règlementaire entraine automatiquement des trop-perçus ou en termes simples un vol pur de l’argent des consommateurs. Il est d’ailleurs curieux d’observer un silence coupable des organisations de défense des droits des consommateurs.

Qu’il s’agisse des tarifs des services aériens ou des prix des produits surgelés d’importation, c’est dans ce cadre qu’il convient de placer les actions engagées par le Gouvernement de la République dont l’ambition clairement exprimée est de protéger le pouvoir d’achat des ménages congolais contre toute forme de manipulation des prix.

Toutes ces actions ont fait l’objet d’abondantes publications dans la presse de sorte qu’il relève de la mauvaise foi, ou pire de l’ignorance, de faire l’impasse sur cette donne et de prétendre que le Ministre de l’économie, lorsqu’il exerce l’une de ses attributions telle que décrite précédemment, « fait du populisme », « a réuni tous les importateurs pour les obliger unilatéralement à définir une nouvelle structure de prix », « a présenté au cours d’un conseil des Ministres une « formule spéciale » pour mettre fin à la surfacturation dans le chef des importateurs et a abouti à des prix qui devraient être appliqués pour les produits importés sur le marché de Kinshasa » . C’est étonnant de voir à quel point les congolais sous-estiment le travail que le gouvernement réalise à son bénéfice. Il faut absolument rester crédible et éviter des sentiments envers un tel ou un tel autre ministre, privilégier les faits et la vérité.
Alors que tout le monde s’insurge contre ces pratiques mafieuses et que le Gouvernement décide enfin de mener des actions décisives en faveur des consommateurs, il est incompréhensible que des compatriotes s’engagent dans une campagne de sape au profit de l’appauvrissement du plus grand nombre, en ayant recours à des informations manifestement déformées. Ceci est étonnant d’autant plus que le coût de la vérification desdites informations est quasi nul !

Non content d’étaler ainsi sa méconnaissance des principes légaux et règlementaires qui fondent le contrôle a posteriori des prix par le Ministre de l’Economie Nationale ainsi que le processus de rationalisation de leurs structures, l’auteur du dernier pamphlet de cette saga conclut ses élucubrations par de laconiques conjectures sur les modalités d’acquisition par le Gouvernement de la République d’un quota de pêche auprès du Gouvernement namibien et sur l’action conjoncturelle visant, pourtant, la maîtrise du circuit d’importation des produits surgelés en vue d’en connaître les véritables coûts et de les cristalliser dans le système officiel de recouvrement de la fiscalité et de la parafiscalité relatives auxdites importations. Il est inacceptable que des compatriotes décident de démobiliser l’opinion publique et sapent les efforts de notre gouvernement pour des intérêts obscurs. Il doit y avoir des patriotes pour protéger la Patrie.


III. LES FAITS

De ce qui précède, il apparaît malheureusement que l’hypothèse d’un combat d’arrière-garde commandité par des lobbies intéressés est tout à fait plausible en l’espèce. Pour s’en convaincre il suffit de remarquer que les différentes publications commandées font curieusement l’impasse sur les considérations majeures ci-après pourtant publiques et connues :

  1. Le processus de rationalisation des structures des prix des biens et des services précédemment épinglés a été adopté par le Conseil des Ministres après examen par les commissions gouvernementales compétentes.
  2. Le Conseil des Ministres du 25 juin 2021 avait clairement mandaté le Ministre de l’Economie Nationale d’étendre ce processus à tous les biens et services de grande consommation.
  3. Les principaux importateurs des produits surgelés ont opposé une résistance farouche à l’initiative du Gouvernement malgré la démonstration de la fraude systématique qu’ils pratiquent au mépris de la loi et au détriment du trésor public et de la population. Il a été clairement mis en évidence une fraude généralisée qui commence par une sous-évaluation de la valeur des marchandises déclarées à la douane et se poursuit par une surcharge illégale des structures des prix.
  4. Une analyse sur base des données de la chaîne d’approvisionnement permet de confirmer le constat de fraude massive pratiquée par les importateurs des produits surgelés pendant plusieurs années. Pour commencer, ils produisent des fausses déclarations sur l’origine, la nature, la quantité et les valeurs des marchandises (valeurs CIF) à la douane et aux autres services de l’État pour éviter de payer les taxes et droits à l’importation. Ici l’État perd de millions de dollars chaque mois. Il faut rappeler que le même journal qui tire curieusement sur le Ministre de l’Économie a, il y a quelque mois, publié des évidences confirmant ces faits. Après avoir volé le Trésor Public, les importateurs véreux surchargent les structures des prix pour faire supporter aux pauvres consommateurs congolais le poids de leur fraude et de leurs fausses déclarations douanières. Avec une simple curiosité scientifique, les données ici évoquées peuvent être consultées au ministère de l’économie comme je l’ai fait.
  5. Des concertations ont bel et bien eu lieu pour étaler la fraude au grand jour et un procès-verbal a été signé par les importateurs d’une part et par deux Ministres du Gouvernement en l’occurrence le Ministre de l’Économie et celui du Commerce extérieur. Le gouvernement devrait d’ailleurs mettre ce genre de documents sur la place publique afin d’édifier les congolais. Malgré cela, pour faire plier le Gouvernement qui était cette fois-ci visiblement résolu à éliminer cette mafia, les principaux importateurs sont allés jusqu’à pratiquer de la rétention des stocks dans l’objectif de créer une rareté artificielle des produits surgelés et amplifier la spéculation sur le marché. Peut-on seulement imaginer les conséquences politiques et sociales qui découlent de cette pratique malsaine ? Et si durant les festivités de fin d’année, il n’y avait ni poisson ni poulet ni viande sur le marché ? Comment soutenir ne serait-ce qu’indirectement des opérateurs vraisemblablement opposés aux intérêts de notre population. Pour quelle bonne raison, ces opérateurs économiques tentent-ils d’affamer les congolais ? Pourquoi essaient-ils de les monter contre le gouvernement ? Y a-t-il un agenda politique derrière toute la campagne qui suit les envolées des prix ? A qui sert cette publicité orchestrée en mettant en scène des congolaises et des congolais qui se plaignent avec raison des évolutions bizarres des prix. Qui essaie d’empêcher le gouvernement d’assumer ses responsabilités ?
  6. Des rubriques retrouvées dans la structure des prix.

(Stevedoring, Charge transit, CVM (Compagnie des Voies Maritimes), Pilotage RVM, LMC (Ligne Maritime Congolaise), DPM, Taxe débarquement – repère – Mairie, DGM, Taxe à l’importation, Frais divers, Autres taxes (TAPO-TRA etc.), Frais taxes divers Matadi, Frais de payage, Transport Matadi – Kinshasa (120 USD au lieu de 80 USD, Frais de transport inter-ville, Coût fixe de stockage, Frais électricité, Consommables, Frais d’entretien, Débours charges, Frais perte de poids, Charges indirectes de points de vente, Commission Prix de vente, Frais administratifs, Charges financières en devises étrangères de 7% du FOB, Charges financières en CDF de 18,5% de toutes les charges).
Tous ces éléments incontrôlables viennent surcharger le prix auquel le congolais achète les biens. Aucune transparence n’est observée dans le chef des opérateurs qui tentent d’imposer les règles de jeu.

  1. Les pourparlers avec les autorités namibiennes en vue de l’acquisition d’un quota de pêche furent ordonnés par le Gouvernement et menés par une équipe composée de délégués de la Présidence de la République, de la Primature, du Ministère de l’Economie Nationale et du Ministère du Commerce Extérieur.
  2. Les prix des produits surgelés évoqués par le Conseil des Ministres furent calculés sur la base des valeurs CIF des marchandises déclarées par les importateurs à la douane et portées par les bulletins de liquidation dûment établis par la DGDA et sur base desquelles les droits d’entrée ainsi que les taxes dues aux différents services étatiques sont calculés.
  3. La publication desdits prix par le Gouvernement a permis de mettre en évidence la minoration de ces valeurs CIF et la fraude massive et systématique qui fait perdre au Trésor Public et aux services concernés, chaque année et sur chaque produit, de colossales sommes se chiffrant en millions de dollars américains.
  4. Les importations conjoncturelles effectuées par le Gouvernement, ont pour but : la maîtrise du circuit des importations en vue d’en maîtriser les coûts ; la cristallisation desdits coûts dans le système officiel de prélèvement de la fiscalité douanière et de la parafiscalité afférente à de telles importations ; la suppression des intermédiaires pour l’accès aux produits et l’éradication du commerce triangulaire, pratiques qui surenchérissent les coûts desdits produits ; la suppression des monopoles et autres ententes monopolistiques instaurés par une poignée d’importateurs au détriment d’une concurrence saine, seule à même de générer des prix justes.
  5. La lutte pour le respect du circuit normal des importations rétablira la classe moyenne des distributeurs congolais en mettant, à terme, fin à la pratique illicite du cumul des marges bénéficiaires par les importateurs qui sont à la fois grossistes, distributeurs, voire détaillants mais aussi transitaires et transporteurs.
  6. L’examen des structures des prix déposés par les importateurs au secrétariat général du ministère de l’Economie Nationale, sur exigence de la règlementation en vigueur, a révélé plus de 20 (vingt) éléments non incorporables surchargeant lesdites structures et érodant illégalement le pouvoir d’achat des consommateurs par la pratique des prix illicites.
  7. En élaguant des structures des prix des biens et services de grande consommation les éléments non incorporables, en invitant les opérateurs économiques à déclarer les vraies valeurs CIF de leurs marchandises et à respecter les marges bénéficiaires autorisées, le Gouvernement favorise l’application des justes prix et n’impose pas du tout une baisse desdits prix.

Cela étant, on n’attirera jamais assez l’attention et la prudence du lecteur de telles productions journalistiques constamment à la recherche du sensationnel et faisant totalement de la recherche de la bonne information pourtant disponible. Consciemment ou non, de tels articles servent les intérêts des fossoyeurs de notre économie en torpillant les légitimes efforts du Gouvernement visant la surveillance du marché intérieur dans l’intérêt des consommateurs mais aussi des opérateurs économiques , investisseurs , demandeurs d’un environnement des affaires assaini.

Il reste bien entendu nécessaire que le Gouvernement continue à travailler sur la promotion de la production locale de tous ces produits, tel que Son Excellence Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement l’a rappelé en date du 30 décembre 2021 à l’occasion de sa visite d’inspection des entrepôts sélectionnés pour la vente des produits surgelés importés par le Gouvernement. Il a rappelé à cette occasion qu’il s’agit d’une action du Gouvernement qui s’inscrit dans la vision du Chef de l’Etat visant, notamment, l’amélioration du panier de la ménagère. C’est ce qu’il convient de retenir en se tournant vers l’avenir.
Quant au ministère de l’économie, il ferait œuvre utile d’informer amplement les citoyens, privés à l’appui, des pratiques de certains opérateurs économiques qui étranglent les citoyens et au besoin, les neutraliser.

A.L KITENGE Stratège et Analyste économique