Obasanjo, Kabila

Il est l’un des rares chefs d’État à avoir quitté le pouvoir et à s’adonner à des activités privées d’un citoyen ordinaire. Président du Nigeria entre 1976 et 1979, puis entre 1999 et 2007, Olusegun Obasanjo s’invite dans la crise politique en RDC.

Dans un entretien accordé au Magazine français Paris Match depuis Oyo, fief de Sassou Nguesso au Congo Brazzaville où il participait au lancement du Fond Bleu pour le Bassin du Congo, l’ancien chef de l’État a des conseils au président de la RDC confronté à une crise liée à la fin de son second et dernier mandat.

Interrogé sur sa présence à un évènement qui ne concerne pas le Nigeria, Olusegun Obasanjo a répondu qu’il s’agit de l’Afrique. Deuxièmement, qu’avec le Fond Bleu, il s’agit de s’assurer qu’aucun coin de la région ne puisse basculer dans une guerre civile. « Pour être précis, la situation en République Démocratique du Congo nous préoccupe beaucoup », a-t-il ajouté.

C’est ainsi que plus loin, le journaliste de Paris Match lui demande si l’idée du Fond Bleu (qui entend promouvoir la stabilité dans la région par le partage des intérêts communs) était née de la difficulté à convaincre Joseph Kabila à céder son fauteuil ?

« Pas vraiment », a répondu l’ancien président avant d’ajouter, « la mission que nous nous assignons se limite à obtenir des gouvernants qu’ils soutiennent nos projets, et se faisant de maintenir le dialogue. De leur faire comprendre aussi que ne pas faire ce qui doit être fait leur coûtera au final plus cher que d’avoir fait ce qui devait l’être ».

Mais Obasanjo a fini par lancer directement un message à Joseph Kabila. « Ce dernier doit comprendre qu’il y a une vie après avoir gouverné, certains d’entre nous l’ont pratiqué et constaté. Moi-même je peux lui assurer que c’est formidable. Si cet enseignement se répandait du reste parmi nos leaders africains, cela serait un vrai progrès », a espéré celui qui n’hésite plus à s’afficher dans ses poulaillers loin du palais présidentiel.

Olusegun Obanjo est arrivé au pouvoir dans les conditions quasi similaires avec celles qui ont porté Joseph Kabila aux commandes à Kinshasa. Il est aux côtés du général putschiste Murtala Mohamed lorsque celui-ci prend le pouvoir par coup d’État en 1975. Sept mois plus tard, Murtala est assassiné lors d’une tentative avortée de coup d’État. À la tête de l’armée, Obasanjo s’empare du pouvoir, fait rédiger une nouvelle constitution et se retire.

Son retour en politique, puis sa double élection en 1999 et 2003 rappellent, à quelques exceptions près, un certain Joseph Kabila arrivé lui aussi au pouvoir après l’assassinat de son prédécesseur en 2001 avant de conduire le pays aux élections démocratiques en 2006.

Aujourd’hui, Obasanjo qui pense que la plupart des chefs d’État refusent de partir parce qu’ils « ont peur de l’inconnu » est d’accord que le statut d’ancien chef d’État soit clairement inscrit dans une loi. « Faisons en sortes qu’ils l’obtiennent si cela peut les inciter à céder leurs fauteuils », a-t-il ironisé.