Jusque-là épargné par les affaires, Martin Fayulu est depuis quelques jours au cœur d’une rocambolesque polémique. Le gouverneur de la ville de Kinshasa André Kimbuta lui aurait remis une somme de 40.000$, a-t-on appris à l’issue de la plénière de jeudi au centre interdiocésain. Une réunion qualifiée de houleuse par un participant.

En réaction à ces graves accusations de corruption lancées par son désormais frère ennemi Joseph Olenghankoy, chef des frondeurs du Rassemblement, le président de l’ECidé a reconnu avoir reçu la somme. Mais à titre « d’un prêt en 2007 » et qu’il a aurait déjà « remboursé devant témoins », a martelé le modérateur de la Dynamique de l’opposition.

Pourquoi Fayulu ?

Si on ne peut pas exonérer Martin Fayulu de ces pratiques dans lesquelles ils nagent tous de la tête au pied, de Mobutu à Kabila, il y a lieu, tout de même, de s’interroger sur le timing. Pourquoi maintenant et pourquoi Fayulu ? Ces accusations (très graves) interviennent en pleines tempêtes au sein du Rassemblement, miné par les guerres du leadership après la mort de l’opposant historique Étienne Tshisekedi. Il s’agit pour les accusateurs de semer encore un peu plus de doute entre les uns et les autres. D’envoyer le message que tous mangent chez et avec l’ennemi.

Martin Fayulu, député provincial de Kinshasa se rendant à l’assemblée provinciale.

En ciblant particulièrement le président de l’ECidé, le pouvoir (s’il est prouvé qu’il est derrière ce coup), attaque un symbole. Un homme qui a réussi jusque-là à envoyer l’image de l’honnêteté dans l’opinion, d’un homme d’affaires qui a réussi sa vie et qui ne ferait de la politique que par dévouement.

Mais abimer l’image de Fayulu, c’est surtout porter un coup à un mobilisateur des masses que compte encore l’opposition après la disparition du Sphinx de Limete.

« Sans l’accord de la Saint Sylvestre, toutes les institutions sont illégitimes », prévenait-il le 15 Mars dernier, à l’occasion de la 12e convention de la Dynamique de l’opposition. Une semaine plutôt, c’est encore lui qui lit la déclaration du Rassemblement réuni derrière Félix Tshisekedi pour dire « à la population d’attendre un mot d’ordre ». Gardant ainsi son ton ferme qu’il a depuis le début contre le pouvoir.

Sur le terrain, aux côtés des Kamerhe et la Dynamique, en 2015, Martin Fayulu et ses camarades réussissent à faire reculer le gouvernement sur le projet de modification de la loi électorale. En 2016, en plein débat sur la fin de mandat présidentiel, Kamerhe n’est plus avec l’opposition (radicale), Fayulu, lui, sillonne les ruelles de Kinshasa, tracts à la main. Résultat, plusieurs milliers de Kinois sont dans la rue les 19 et 20 Septembre pour défier les forces de sécurité.

Touché à la tête par un projectile, Martin Fayulu a failli y rester ce jour là. Les billets de dollars vont-ils l’achever ?