Makala, evasion

Les Kinois sont appelés à collaborer avec les forces de l’ordre pour dénoncer tous ces « criminels » et « évadés » qui se cacheraient dans différents quartiers de la capitale et à signaler leur présence aux autorités.  C’est par cet appel de la police nationale que s’est conclue une journée digne d’un film hollywoodien, qui a vu le chef spirituel de Bundu dia Kongo Ne Mwanda Nsemi se volatiliser de la prison centrale de Makala, ainsi qu’une cinquantaine d’autres détenus, selon le gouvernement.

Un décompte de très loin différent des témoignages des habitants des quartiers environnants la célèbre prison de Kinshasa, qui ont, eux, affirmé, avoir aperçu des centaines, voire, des milliers de personnes s’en fuir au milieu des tirs nourris. De quoi Susciter des interrogations.

Sans attendre une enquête et sans en apporter une preuve palpable, le gouvernement s’est empressé de trouver le coupable. « Ce sont les adeptes de Bundu dia Kongo qui ont attaqué la prison pour libérer leur chef spirituel ne Mwanda Nsemi », a tranché le porte-parole du gouvernement Lambert Mende. Relayé par son collègue de la justice Alexis Thambwe Mwamba pour qui, en dehors de Ne Mwanda Nsemi, « les autres détenus emblématiques étaient resté dans leurs cellules », a-t-il rassuré.

Mais cette présentation des faits a provoqué de l’incrédulité chez de nombreux Kinois. Sachant que les combattants de Bundu dia Kongo se battent généralement grâce avec des moyens traditionnels bien dérisoires pour défier une telle forteresse qu’est la redoutable prison de Makala.

« Un montage de mauvais goût »

Deuxièmement, comment, dans une si grande ville, en pleine crise politique, et avec toute la probabilité de croiser les forces de l’ordre dans chaque coin de rue, comment, Ne Mwanda Nsemi et toute la bande qui s’est faite la belle, ont-ils, pu, prendre l’étonnante décision de s’évader avec tout le risque de se faire rattraper ? Des questions qui se posent avec acuité, d’autant que la direction de Bundu dia Kongo a formellement démenti toute implication dans l’attaque tout en dénonçant une « mascarade » et un « montage de mauvais goût ».

Enfin, beaucoup, à Kinshasa se sont posés la question de savoir pourquoi c’est ce modeste Ne Mwanda Nsemi qui prendrait une telle initiative aux conséquences incalculables, et non, les figures emblématiques que compte la redoutable prison de Makala. Notamment les militaires condamnés dans l’assassinat de l’ancien président Laurent Désiré Kabila, restés dans leurs cellules sans bouger d’un iota.

Des questions qui risquent de rester sans réponse. À moins que le gourou de BDK se rende aux autorités ou révèle son lieu de cachette pour dire toute la vérité aux Congolais.

Arrêté, puis incarcéré en Mars dernier pour outrage au chef de l’État et incitation à la haine tribale, revoici Ne Mwanda devant les feux des projecteurs, bien malgré lui.  Qui plus est, un 17 mai, jour symbolique de la fin du régime de Mobutu et du début réel de l’actuel régime en place. Jour, qui sera désormais associé à cette rocambolesque histoire, que les Kinois n’ont pas tardé à détourner en la comparant à la  célèbre série américaine « Prison Break ». Non sans ironie face à des nombreuses interrogations.


l’affiche détournée de la Série « Prison Break »