Kabila, ONU

Par CAS-INFO

La 72e assemblée générale de l’ONU a commencé le mardi 19 septembre sans le président congolais qui traine encore dans le pays. Alors que le pays amorce la phase la plus décisive de la crise politique, à 3 mois du 31 décembre, la date où tout doit s' »arrêter », Joseph Kabila a préféré se concentrer sur sa stratégie nationale. Il ne se rendra à New York qu’au milieu de la semaine. Et le président de la république sait, pour quatre raisons suivantes, que ce n’est pas New York qui écrira son avenir.

L’Afrique et la RDC ne sont pas la priorité

Hors-mi la lutte contre le terrorisme au Sahel, qui est dans l’intérêt occidental, et l’aide au développement, qui vise à tenir éloignés de l’Europe, les candidats à l’immigration – deux sujets abordés par Emmanuel Macron, l’Afrique n’a été évoquée par Donald Trump que dans les généralités. Normal. L’agenda international est chargé des dossiers bien plus brulants que les jérémiades des Africains : la Corée du nord et la course folle de Piongyang à l’arme nucléaire, l’accord nucléaire avec l’Iran que la Maison Blanche cherche à détricoter ou encore le climat avec la furie des ouragans qui n’en finissent pas de balayer les caraïbes et une partie de l’Amérique du nord . De quoi reléguer l’Afrique et ses crises constitutionnelles au rang de détails.

Le peu d’intérêt de Trump pour l’Afrique

Depuis son arrivée à la Maison Blanche, le président américain parle beaucoup. Mais peu de l’Afrique. Et pour cause, le désintérêt du milliardaire pour le continent. Attendus par de nombreux africains comme le messie qui viendrait les sauver des présidents qui s’accrochent, Donald Trump a mis 9 mois pour désigner son  » monsieur Afrique ». Pour le grand plaisir des Nkurunziza, Bongo, Sassou…Kabila.




Et même s’il a convié ses homologues africains présents à New York à un dîner, mercredi, le président des États unis est resté vague et protocolaire déplorant simplement les conflits qui causent des grandes souffrances aux populations africaines. Conflits dont la solution réside dans les processus pacifiques, a plaidé Donald Trump. Une approche pacifiste qui tranche avec la fermeté utilisée sur le Venezuela dont le président Nicolas Maduro accroché à son fauteuil est pourtant décrié au même titre que ses homologues de Kinshasa ou de Brazza.

L’impuissance de la communauté internationale face à des crises internes

C’est sur cette carte que Nkurunziza ou Kabila surfe depuis longtemps. Et ça fonctionne. Dans un monde multipolaire et dans lequel les intérêts, y compris les plus obscurs s’entrecroisent, les décisions de la communauté internationale sont devenues tellement impuissantes. En RDC, cet échec est encore beaucoup remarquable après une batterie de sanctions des États unis et de l’Union européenne qui ont visé ces derniers mois des personnalités hauts placées du pays sans jamais inverser les rapports de forces sur le terrain.Preuve que cette communauté internationale aboie et Kabila continue, la déconvenue symbolique subie par l’ONU dans le dossier Katumbi. L’ancien gouverneur du Kananga reste coincé à exil malgré la décision du comité de droits de l’homme appelant Kinshasa en juin dernier à autoriser le retour au pays de l’opposant et sa participation à la présidentielle. L’ONU décide mais n’a pas les moyens de faire imposer ses décisions à l’intérieur des frontières des États souverains.

Un dénouement à huis clos

Dans ces conditions, l’ONU, l’UE, l’OIF et les organisations internationales ne pouvaient pas faire grand-chose si ce n’est s’en remettre, mardi, à l’accord de la Saint Sylvestre et réclamer une présidentielle à la fin de l’année. Une aubaine pour Kinshasa qui répète à qui veut l’entendre que le compromis de la Cenco est bien en cours d’exécution depuis la mise en place controversée du gouvernement Tshibala suivi de l’installation tout aussi douteuse du Conseil national du suivi de l’accord chapeauté par le trouble-fête Joseph Olenga Nkoy.

S’appuyant par ailleurs sur une CENI peu pressée, qui a, sans convaincre, renvoyé les élections à plus tard, et instrumentalisant le Kasaï, Joseph Kabila peut ainsi gagner du temps. Loin des discours de New York. D’autant plus que, d’ici octobre, avec la décision controversée du gouvernement d’invalider les passeports semi-biométriques, les opposants au régime dont l’une des clés reste la sensibilisation de la communauté internationale pourraient se voir être soit, bloqués loin en dehors des frontières, soit, à l’intérieur sans avoir la possibilité d’en sortir. Un sort que connaissent déjà journalistes étrangers, défenseurs de droits de l’homme et autres témoins gênants potentiels. Comme si la bataille du 31 décembre se préparait…à huis clos.