Kabila, Tshisekedi

La crise politique en République Démocratique du Congo s’est transportée depuis quelques jours sur le terrain diplomatique. Un duel que se livrent à distance les deux principales composantes de la classe politique congolaise, la Majorité présidentielle et le Rassemblement. Avec à leur tête, leurs chefs de file, Joseph Kabila et Félix Tshisekedi.

Le dernier acte en date a été posé lundi par le patron du Rassemblement. Dans son discours d’anniversaire de l’instauration du multipartisme le 24 avril, le numéro 2 de l’Udps a lancé un appel à toutes les organisations régionales africaines, l’Union Africaine (UA), la Communauté de développement de l’Afrique Australe (SADC), la Conférence internationale pour la région des grands lacs (CIRGL) – avec des chefs d’États importants cités nommément, Alpha Condé, Jacob Zuma ou encore le puissant voisin angolais Edouardo Dos Santos – « à s’impliquer aux côtés du Secrétaire général de l’ONU en vue d’un dénouement rapide de la crise ».

L’épilogue, pour Félix Tshisekedi, qui a regagné Kinshasa après une visite chez Alpha Condé et une mission « secrète » qui lui a permis d’effectuer des contacts importants selon les cadres du Rassemblement.

« Non à l’ingérence »

« Ils ont gaspillé l’argent de l’Etat pour me suivre à Addis Abeba où je ne me trouvais pas ». L’ironie de Félix Tshisekedi n’avait pas ainsi tardé pour commenter la contre-offensive déclenchée dans sa suite par le ministre des Affaires étrangères au siège de l’Union Africaine. À la tête d’une forte délégation, Léonard She Okitundu a, ensuite, déroulé une série de visite chez les présidents « amis », le Gabonais Ali Bongo, l’Equato-Guinéen Teodoro Obiang Nguema et le Tchadien Idriss Déby Itno à qui il devait remettre une lettre du chef de l’État.

Mais c’est bien Joseph Kabila qui a repris sa diplomatie en main en posant le 22 Avril aux côtés du président Égyptien Abdel Fatah Al-Sissi, avec lequel il a réaffirmé son hostilité à l’« ingérence étrangère dans les affaires intérieures ».

Toujours président, malgré l’expiration de son mandat, Joseph Kabila garde l’avantage de voir ses homologues lui dérouler le tapis rouge. L’occasion pour lui d’imposer sa thèse de la crise auprès de ses pairs et dans les instances africaines.

La bataille de l’Afrique centrale ?

Pour les deux camps, la clé de la crise se jouera peut-être du côté des voisins immédiats. En rencontrant Ali Bongo le 23 avril, Joseph Kabila a obtenu que la crise congolaise avec son évolution actuelle sera portée à la session ministérielle de la CEEAC à la fin du mois.

Du côté du Rassemblement, on accourt, plutôt, chez le grand frère angolais. La coalition de l’opposition en est peut être convaincue. Avec son influence et sa crainte de voir la crise congolaise déborder à l’intérieur de ses frontières, l’Angola peut faire basculer la situation à tout moment.

Pour l’instant c’est bien Joseph Kabila qui garde la main. Une main bien ferme.