Félix Tshiskedi, courte transition

Le Secrétaire général adjoint de l’Udps Félix Tshisekedi a suggéré mardi qu’en cas d’absence d’élections au 31 décembre 2017, une courte transition devrait être mise en place sans le chef de l’État actuel, mais avec une personnalité consensuelle, chargée de conduire le pays aux élections dans un délai ne dépassant pas 6 mois. Si dans la forme, l’idée séduit, dans la pratique, elle semble bien compliquée à mettre en place. Au regard du droit, u paysage politique et du contexte historique de la crise politique qui touche le pays.

Côté légal, d’abord, la proposition du leader de l’Udps a de fortes chances de ramener le pays à Mai 2016. C’est-à-dire, au débat autour de l’article 70 de la constitution. Celui-ci, dispose, dans son alinéa 2, que le « chef de l’État reste en fonction jusqu’à l’installation effective du nouveau président élu ». Or, si Joseph Kabila doit, quand-même, son présent séjour au Palais de la Nation, à l’accord de la Saint Sylvestre, ses partisans n’ont jamais cessé de brandir la décision de la Cour constitutionnelle (de Mai 2016 donc) autorisant le président de la République à garder son poste le temps d’élire un successeur.

L’impossible scénario

Pour Félix Tshisekedi, après le constat de la non tenue des élections au lendemain du 31 décembre 2017, la classe politique devra se réunir pour choisir un homme ou une femme chargé d’assurer l’intérim. Là encore des questions se posent : par quel mécanisme ? La logique constitutionnelle ici (article 75) voudrait qu’en cas d’empêchement du président de la république, le président du Senat prenne les rênes du Pouvoir pour conduire le pays aux élections. Déjà hors mandat bien longtemps avant le chef de l’État, l’hypothèse Kengo reste à ce jour, malgré tout, la seule à même de justifier une certaine légitimité. Or, une une éventuelle vacance au pouvoir doit, au préalable, et suivant l’article 76, être déclarée par la Cour constitutionnelle (qui a prolongé Joseph Kabila), elle-même saisie par le Gouvernement (que Joseph Kabila a nommé).

Dans l’hypothèse où l’opposition contournerait cette contrainte institutionnelle, une autre série de questions et non de montre se pose : comment mettre en place un tel dispositif ? Qui pour convoquer un tel processus ? L’ONU ? Les évêques ? La première a déjà initié et supervisé un dialogue en RDC. Mais c’était entre les belligérants – Dialogue inter congolais, qui aboutit le 17 décembre 2002 à l’accord de Pretoria mettant fin à 4 ans de guerre et permettant la mise en place de la fameuse transition « 1+4 ». Quant aux évêques, leur récente médiation remonte à décembre 2016. Pour le résultat que l’on connait : un accord, celui de la Saint Sylvestre, et une transition d’un an aujourd’hui plus que jamais remise en cause. Difficile, dans ces conditions, d’imaginer les prêtres revêtir de nouveau la soutane de sauveur dans le cadre des nouveaux pourparlers, eux qui agitent déjà la menace des manifestations pacifiques, la « rue », en langage poli.

Un calcul…

Et lorsqu’on sait que la Majorité présidentielle a d’ores déjà prévenu qu’un tel scénario ressemblerait à un « coup d’État », une même accusation portée par l’opposition contre le Pouvoir (article 64 contre article 64), on arrive finalement à la conclusion que la sortie de Félix Tshisekedi ressemble plus à une tactique politique qu’à un réel plan de sortie de crise, dont tout le monde, y compris le patron du Rassemblement lui-même sait très bien qu’il aura du mal à connaitre un début de commencement. À moins d’une grande révolution.

Bref, Félix Tshisekedi est dans un calcul politique. Il s’agit vraisemblablement pour lui, de, davantage, chercher à pousser Joseph Kabila – afin d’éviter une improbable mise à l’écart, qui serait synonyme d’humiliation – à se dévoiler en laissant par exemple la Ceni publier le calendrier électoral. Ce qui pourrait, au mieux, déclencher le processus du choix d’un dauphin, au pire, aiguiser les appétits dans le camp présidentiel. Et pourquoi pas, lancer, enfin, la compétition.